Les chemins de fer de la migration

Touché par cette image d’un adolescent marchant seul sur une voie ferrée.

Combien de migrants ont-ils empruntés ce chemin étroit et intransigeant du déracinement de leur terre natale, avec pour seule destination un horizon improbable.

Le chemin de fer dit bien ce qu’il est, il est rigide, balisé par deux rails inflexibles.

Il ne s’agit pas d’un petit sentier qui folâtre aux travers des champs et des vergers, et qui a le loisir d’aller de découverte en découverte.

Le chemin de la migration s’avère également rectiligne, sans concession, le temps étant compté, pressé par les nécessités de survie. L’urgence de se rendre à bon port le plus rapidement possible, sans même savoir si cette destination existe vraiment ou si elle n’est que mirage sans cesse repoussé.

Les rails, les fossés entourant les voies ferrées, les ponts de métal, les agglomérations traversées qui n’affichent que le dos et les volets clos des maisons, tous sont impersonnels et froids, aucune terre d’accueil jusqu’à ce qu’enfin les migrants rencontrent des mains tendues, un gîte et de la nourriture pour les réconforter.

C’est une épreuve qui marque toute une vie et qui met notre humanité au défi.

Qu’es-tu devenu?

Toi l’enfant que j’ai aperçu
aux frontières du désert.

J’ai entendu ton appel
dans le silence brûlant.

Ton regard a traversé mon cœur
et je ne peux plus t’oublier.

Pourquoi cette clôture qui nous sépare
et m’empêche de t’accueillir?

Et surtout,
d’où nous viennent ces nouvelles brumes tenaces
qui font que je ne te vois plus?
comme si tu n’existais plus…

Entre naufrage et sauvetage

Illustration inspirée d’un portrait de migrant du photojournaliste César Dezfuli

Nous sommes en Méditerranée.

Une embarcation chargée de migrants est à la dérive. Sur le navire qui se porte à sa rescousse se trouve un photojournaliste, César Dezfuli.

Au lieu de couvrir le drame collectif qui se déroule devant lui, César décide de passer deux minutes avec chacun des rescapés et de prendre des photos de chacun d’entre-eux, tels qu’ils sont, avec pour unique arrière-plan la mer qui s’étend jusqu’à l’horizon. Toujours en prenant bien soin de consigner précieusement leur nom.

C’est ce qu’on pourrait appeler un journalisme de cœur, beaucoup plus attentif à la personne qu’à l’aspect médiatique de l’événement. Les médias se préoccupant habituellement plus souvent du sensationnalisme de la situation ou du décompte du nombres de victimes.

Ce que César a réussi à capter, au travers de son appareil photo, c’est la présence de chacun face à l’inconnu, dans cette extrême vulnérabilité d’avoir tout quitté, d’avoir tout perdu, et de ne pas savoir de quoi sera fait demain.

Entre naufrage et sauvetage…

Une chose reste profondément signifiante, au-delà du portrait global que l’on peut tenter de se faire d’une situation à grand renfort de statistiques : la rencontre avec la personne.

C’est ce à quoi César Dezfuli nous convie au travers de sa série de photos de migrants.

Pour visionner les photos de la série « Passengers » de César Dezfuli :
http://www.cesardezfuli.com/passengers

Au début, aucun média n’a voulu publier les portraits de migrants de César, jusqu’à ce qu’il remporte un concours. Lire l’histoire :
https://fr.canon.ch/pro/stories/cesar-dezfuli-migrants/

En apprendre plus sur le site de César :
http://www.cesardezfuli.co

Cet article a été précédemment publié sur le site des Antennes de paix

Gagnant ou perdant?

J’ai fait récemment quelques dessins en solidarité avec les victimes civiles de la guerre.

Une amie m’a dit : “Pourquoi est-ce que tu ne dessines pas aussi des soldats? Eux aussi vivent intérieurement la détresse des conflits armés!”
Je reconnais que c’est totalement vrai, c’est facile de considérer l’ensemble des soldats comme des pions déshumanisés, alors que derrière leurs armes, sous leur casque et dans leur char d’assaut il y a aussi des cœurs qui battent.

Il me semble que tout le monde est d’une façon ou d’une autre perdant dans une guerre, peut-être en tout premier parce c’est une forme d’échec. Échec de la paix en tout cas.

Les analystes nous expliquent qu’en politique il est vital pour les belligérants de “gagner la guerre”. Un chef d’état considère qu’il a gagné la guerre lorsqu’il réussi à écraser son opposant. Mais à quel prix et avec combien de pertes?

Pour l’ensemble de la population et des simples soldats, la guerre a un goût amer.

Illustrations inspirées de photos trouvées sur le web.

Nés avec un panier vide sur le dos

Je me demande si d’une certaine façon nous ne sommes pas toutes et tous nés avec un panier vide au bout du bras ou sur le dos.

À en voir le regard vierge de l’enfance qui contemple toute chose avec un regard neuf, sans filtre ni idée préconçue. Leur panier est vide, ils sont tout prêts à glaner au fil de la vie les découvertes qui se présentent.

Et puis avec le temps, ce panier se remplit, emmagasine les expériences, les pensées, les insécurités et les rêves inaccomplis, jusqu’à éventuellement s’alourdir et devenir un fardeau sans que personne ne s’en rende vraiment compte.


Je reprends ici ma série de dessins solidaires avec ce qui se passe ailleurs, à l’autre bout de la planète.

Non pas par recherche de dépaysement, pour découvrir des terres et réalités inconnues, mais bien pour qu’en mon cœur je n’oublie aucune de ces dimensions propres à notre humanité commune.

Pour moi chaque image de « l’autre » est à la fois un témoignage et un point d’interrogation. Et aussi, de façon tout à fait personnelle, chaque image a un autre sens que celui de représenter la réalité dont elle témoigne. Chaque image me renvoie à mon propre parcours de vie, autant intérieurement qu’extérieurement!


Un roi disait à sa fille :

“Tu es ma princesse,
…pour toujours!

Tu es la fleur de mon cœur,
Tu es la joie de mon âme,
Tu es la perle de mes yeux,
Tu es la cantate de ma chair,
Tu es le parfum de mes jours,

Et tout cela, tu l’es à tous les jours et pour toujours
Peu importe que tu te présentes drapée de bijoux royaux ou en haillons, tu es ma fille, tu es ma princesse.”


Illustrations réalisées à partir de photos trouvées sur le web, je n’ai pas réussi à identifier la source

Trimballer ses sacs avec soi…

Touché par cette image d’un migrant transportant avec lui deux gros sacs dans lequels il a mis à la hâte ce qui lui paraissait le plus important à emporter avant de quitter son pays.

Deux sacs qu’il traine depuis, jour après jour, tout le long du chemin, avec peine et dans la sueur.

Je me reconnais dans ce migrant, combien de gros et pesants sacs me suis-je obstiné à porter durant tant d’années? Avais-je l’impression que c’était là ma raison d’être : Prendre sur mon dos tout ce qui est lourd à porter?

Est-par peur de perdre et de manquer?

Quand ma famille a immigré, j’étais un jeune ado. Nous n’avions avec nous que nos bagages personnels, presque rien. Sensation de vide, comme si tout était à recommencer. Le déracinement social et culturel était encore plus marquant. C’est un vécu qui laisse des traces…


Image librement inspirée dune photo de presse trouvée sur le web (je n’ai pas trouvé le nom de l’auteur de la photo, ni celle de l’homme aux sacs).

De retour à la maison…

Illustration inspirée d’une photo prise en Roumanie par le photographe Sean Gallup

J’ai le souvenir particulièrement vif du retour au domicile familial à la brunante.

Nous habitions un petit village isolé dans la montagne et les enfants étaient libres d’aller et venir un peu partout sans être accompagnés. Tant que nous revenions pour une certaine heure en début de soirée, nos parents ne se soucaient pas trop.

Ce retour prenait encore plus de valeur lorsqu’il nous arrivait de prendre par la main un plus jeune et de l’encourager à marcher le dernier kilomètre qui nous séparait de la maison.

Aujourd’hui, je retrouve encore le même réconfort à tout simplement revenir chez nous le soir, même en voiture.

C’est extraordinaire cette possibilité qu’a l’être humain de revenir à un chez soi, à un port d’attache, à une maison familiale, de retour d’une sortie ou d’un long voyage.

Peu importe que cette maison soit un palace, une hutte de terre ou une tente, c’est la gratitude de retrouver les bras maternels d’un abri, d’un lieu où se déposer, d’un havre d’intériorité.

La maison, dans son enceinte intérieure, nous invite aussi à des retrouvailles avec nos proches et nous-mêmes. Elle devient alors une arche de réconciliation et d’apaisement.

En souhaitant, à toutes les personnes sur terre qui vivent une épreuve, souvent éloignées de leur domicile, qu’il leur soit possible de vivre ce “retour à la maison” le plus rapidement possible!


Entre deux mondes…

Illustration inspirée d’un cliché du photographe Ryan Remiorz – Un grand merci au photographe ainsi qu’à son jeune sujet!

J’ai dessiné cette image parce qu’elle me touche personnellement. Je me reconnais en cet adolescent.

À son âge, je me retrouvais entre deux mondes, doublement déraciné de mon continent d’origine, en rupture de communauté et de culture, en apprivoisement d’un nouveau pays, et surtout avec un immense vide de sens. je ne parvenais pas à entrevoir l’avenir, si ce n’est sous forme de rêves inaccessibles.

Je passais énormément de temps dans ma chambre, ayant pour tout meuble un simple matelas à terre et un sac de couchage, à attendre…

Attendre quoi? Que le souffle passe, qu’une direction se précise, de retrouver un élan pour quelque chose, peu importe quoi…

En phase de transition, ayant quitté l’ancien mais n’étant pas encore vraiment partie prenante du nouveau.

Le déracinement d’une terre natale et la migration vers un autre continent laissent des traces, marquent une vie.

Heureusement, il y avait déjà le dessin qui ouvrait à un autre possible, à une dimension qui transcendait et réconciliait cet écartèlement entre deux mondes.

Et comme pour le jeune homme sur l’image, les murs de ma petite chambre étaient couverts de graffitis.

Cette impression de vivre entre deux mondes m’a poursuivi toute ma vie, et probablement que cela m’a amené vers une sensibilité à ce qui est vécu bien au-delà des frontières!

j’ai commencé jeune à copier des scènes de vie provenant d’un peu partout sur la planète. Tendance qui s’est confirmée avec le temps au travers de mon implication dans des initiatives comme Antennes de paix et Messages sans frontières.

J’inaugure aujourd’hui sur ce site une série d’images de divers pays que vous retrouverez dans la catégorie « Autour du monde ».