Vivant avec la sclérose en plaques depuis 15 ans, et apprivoisant mon corps qui change depuis 4 ans, je vois au quotidien à quel point le handicap peut être une réalité qui effraie, coupe les ponts et isole. Parce que différence et incompréhension font peur.
Mon projet
J’aimerais tellement lever le voile et donner une image réelle du handicap !
Et présenter, à l’occasion, sur mon blog Les hauts et les bas de la vie à roulette (lienhandicap.mobi) non seulement mon vécu, mais aussi différents visages du handicap.
Pourquoi ?
Pour que les gens voient d’abord la personne, avant de voir son fauteuil, sa cane, ses béquilles ou sa marchette ! Ou encore avant de voir seulement sa différence.
Pour briser les préjugés, briser les murs, changer ces perceptions qui enferment, et qui séparent. Parce qu’au fond, le handicap cache autant de réalités qu’il y a de personnes qui la vivent. Et j’aimerais présenter à la fois ses côtés sombres et ses côtés lumineux.
Comment ?
En présentant simplement des récits d’expériences de vie avec un corps différent. Cela pourra prendre la forme d’extraits de témoignages, relatés en version longue, courte ou même très courte, en prose ou poésie.
J’aimerais pouvoir partager différentes situations ou façons dont le handicap est vécu : les détresses, mais aussi les joies, ou même les chemins inattendus et inespérés que le handicap peut nous révéler !
Témoignages recherchés
Vous avez envie de partager des tranches de votre vécu avec le handicap, pour tisser des ponts ?
Contactez-moi pour prendre rendez-vous pour une (ou plusieurs, au besoin) rencontre, au cours de laquelle je recueillerai votre témoignage, vos réponses à mes questions. Les rencontres peuvent être en personne, ou encore par téléphone ou par Skype.
Témoignages aussi recherchés de personnes qui accompagnent ou partagent le quotidien des personnes vivant en situation de handicap
Pour lever le voile aussi sur cette réalité, de ceux et celles qui aiment, accompagnent, soutiennent leur proche vivant en situation de handicap. Pour aussi voir comment le handicap a changé leur vie, leurs craintes, leurs espoirs.
Pour permettre de mieux se comprendre et favoriser un vivre ensemble plus harmonieux, plus heureux !
En fait, je me rends compte que mes motivations sont aussi d’explorer pour apprendre les uns des autres. Pour mieux comprendre mon corps, mes réactions, et celles de ceux qui m’entourent. Mais aussi de percevoir les trésors qui peuvent se cacher derrière un corps différent.
Et de comprendre ce que vivent ceux et celles qui côtoient ceux qui vivent en situation de handicap. Qui lavent, soulèvent, aident et aiment ces corps parfois fragiles et les êtres qu’ils abritent.
Pour un peu constituer comme un carnet de voyage, que l’on a envie de relire pour grandir, se rapprocher de l’autre. De sa différence… et ultimement d’accueillir chacun sa propre différence !
Préambule : j’ai commencé à écrire ce texte en décembre 2013, peu après être tombée et m’être blessée aux côtes, la douleur rendant difficile d’envisager le jour où je pourrai sortir : impossible pour l’instant de penser même prendre un bain, encore moins mettre mes bottes d’hiver, très difficile à mettre avec mes orthèses, et encore bien moins de descendre et monter les escaliers… sans compter les pirouettes que le transport exigent, ou les obstacles d’endroits non adaptés…
Triste comment de plus en plus, les gens qui viennent me voir le font pour m’aider parce que je les paie, ou par sympathie, compassion, et presque plus personne ne vient par simple amitié, affection, ou désir de partager simplement du temps avec moi. Est-ce par peur de devoir m’aider? Il est vrai que j’ai de plus en plus besoin d’aide. Et je n’aime pas demander. Mais comment faire autrement?
Non, je n’ai pas les moyens de payer un assistant 24h sur 24. Ni le désir d’avoir le sentiment d’avoir que des rapports aidant/aidée, réducteurs à la position de personne qui n’a plus rien à offrir. Plus bonne à rien, et qui dérange ou demande sans cesse…
Bon, je sais que je peux être particulièrement dans ma bulle à mes heures. Difficile pour moi de juste parler pour parler. J’ai besoin de profondeur, de liens vrais. De complicité. De rire (et je sais, j’ai un sens de l’humour très particulier). Besoin de rester liée aux défis de notre monde et d’œuvrer à des projets porteurs de vie.
Vivement des projets de société d’une fraîcheur, empreint d’un esprit communautaire où chacun tient place d’être humain à part entière, et participant et contribuant, à sa mesure, à la vie de sa communauté, mais aussi de sa collectivité, et du monde (l’internet peut être un outil incroyable)!
Depuis quelques mois, je rêve de partager mon quotidien avec d’autres, qui soient handicapés ou non, riches, pauvres, étudiants, immigrants, familles, personnes âgées ou jeunes. Tous dans une grande maison ou immeuble à plusieurs chambres. Chacun ayant ses propres quartiers où il peut se retirer au besoin pour travailler à son rythme, se reposer, dessiner, bref, retrouver son intimité. Mais on trouverait aussi au cœur de cette maison des espaces communs (cuisine, salle à manger, salon, salle de rencontre même (que l’on pourrait prêter ou louer à des organismes de la communauté)… des lieux d’échange, de partage et de communion. Où chacun apporterait la richesse de sa présence.
Je rêve d’une maison qui respire l’entraide, où les personnes handicapées seraient supportées dans leur quotidien par les autres colocataires, mais aussi par des employés, et soutenu par la communauté (liens étroits avec les organismes qui œuvrent pour et avec les personnes handicapées dans la communauté.
J’ose rêver aussi d’une maison offrant un environnement favorisant paix intérieure et harmonie. Une maison où serait il possible : de cuisiner ensemble des repas végétariens, de partager des moments d’échange et de prière, d’offrir des ateliers de dessin, et même travailler à des projets communs…
En fait, je rêve d’une maison qui serait l’héritière des Maisons Simon de Cyrène en France, qui s’inspirent elle-même des foyers de l’Arche de Jean Vanier, présents partout dans le monde. Il doit y avoir possibilité d’adapter la formule au Québec, même s’il n’y a pas de service militaire obligatoire.
Quelques statistiques et constats :
Selon une étude réalisée par la Fondation de France en juin 2013, 39 % des Français n’ont aucun lien suivi avec leur famille, 37 % n’ont aucun lien avec leurs voisins, 25 % n’ont aucun ami [3]. De plus, 53 % des Français n’ont pas d’activité professionnelle (retraite, formation, chômage, inactivité) et donc pas de collègues de travail.
Pas moins de 5 millions de gens n’ont aucune de ces cinq catégories de personnes dans leur entourage. Elles n’ont ni amis, ni famille, ni collègues, ne connaissent pas leurs voisins, et ne fréquentent personne via leurs loisirs ! Autrement dit, elles sont seules, seules, seules.
Or, ce phénomène connaît une dramatique augmentation depuis 3 ans : le nombre de personnes de moins de 40 ans frappées de totale solitude a doublé depuis 2010. Le nombre de personnes de plus de 75 ans touchées par l’isolement a augmenté de 50 % depuis 2010 !
Comment s’étonner que se multiplient les cas où des personnes âgées sont maltraitées dans des instituts pendant des années sans que personne ne s’en aperçoive, ou que des cadavres soient découverts des mois ou des années après la mort, dans des appartements où personne ne s’était aperçu qu’il n’y avait plus de vie ?
Nous assistons à une véritable implosion sociale, porteuse d’infinies souffrances pour les victimes car la solitude absolue est une des plus terribles choses qui puisse arriver à un être humain.
« L’homme est un animal social » disait déjà le philosophe Aristote au Ve siècle avant Jésus-Christ. « Il n’est pas bon que l’Homme soit seul » est-il écrit dans le Livre de la Genèse, qui date de 750 avant Jésus-Christ.
Et malheureusement, comme d’habitude, il n’y a aucune recette miracle, aucune solution simple et rapide à proposer. La seule issue est la méthode des petits pas. Chacun à notre niveau, nous pouvons essayer d’améliorer la situation là où c’est possible, c’est-à-dire dans notre entourage et dans notre propre vie, en étant attentif, en étant prévoyant, en évitant de se laisser piéger par la solitude.
Pour terminer, j’ai le goût de partager cette histoire particulièrement touchante :
Réduire le handicap à une seule compensation financière, fût-elle conséquente, c’est enfermer la personne dans un cadre administratif en lui déniant le moteur fondamental qu’est la relation avec autrui. C’est ce dont témoigne une jeune femme handicapée qui avait reçu une somme importante de son assurance. Sophie s’était installée dans un studio, aménagé pour répondre à son invalidité, et bénéficiait des aides dont elle avait besoin. Pourtant, elle nous confiait qu’elle n’était pas heureuse: « Toutes les personnes qui se déplacent pour me voir sont payées pour le faire ». La gratuité de la relation et de l’échange qui ne soient pas la résultante d’une obligation professionnelle avait disparu, et avec elle, le goût du bonheur.
Lorsqu’on a été mis au ban de la société, la seule chose essentielle, c’est l’Autre.
« Nous portons tous en nous nos lieux d’exil, nos délits, nos ravages. Notre tâche n’est pas de les déverser sur le monde mais de les transformer en nous-mêmes et chez les autres. »
Albert Camus
Ouais. Il y a des journées, des saisons, des années où c’est plus facile que d’autres…
Au Québec, que le gouvernement est en train de rebaptiser « Austérité » (on se dit que ce sera mieux avalé que « Boucherie » ou « Saccage des programmes sociaux », ou « retour à l’ère pré- … » ?
Bref, en cette période noire où se succèdent les annonces de fermetures prochaines de centres d’hébergements pour personnes lourdement handicapées, ou le gel ou la non reconduction du financement de programmes d’adaptation de logements ou de services de transport adaptés et autres services essentiels rendant possibles les activités de la vie quotidienne de personnes vivant avec handicap (se lever, se laver, s’habiller, manger, aller aux toilettes..se préparer pour la nuit, se coucher)… Quelques jours après la Journée internationale des personnes handicapées, j’avoue que je ne sais pas, je ne sais plus.
Ces ravages m’anéantissent. Oui, il y a bien eu de beaux articles et entrevues. Et aussi les banderoles et les manifestations. Mais au quotidien, qu’est-ce qu’on fait quand notre voisin, notre ami ou notre frère, que sa copine a pu asseoir dans son fauteuil roulant avant de quitter pour le travail, et qui, en après-midi, est toujours nu, affamé et dans l’impossibilité d’aller aux toilettes, parce que la ou les personnes devant l’habiller, le nourrir et l’aider à aller aux toilettes ne se présentent pas ? Sans avertir?
J’ai mal à ma Terre De nourricière qu’elle était, elle devient austère. Quelle galère! J’en ai froid dans ma chair
Je reconnais plus mon monde, qui revêt de nouveaux paysages de misère, Comme au diapason avec une planète malade, à nouveau prise avec des guerres, La famine, la torture, et la « mode » du gouvernement totalitaire… Quelle affaire!
Cette nouvelle ère me fait perdre mes repaires. Et je n’ai pas envie de me taire. Au contraire.
J’ai besoin de croire en mes racines, besoin d’affirmer que ces mailles, qui ont tissé cette société, cette humanité, jusque dans ses entrailles, et qui ont construit ces systèmes social solidaires, pour toutes ses ouailles, pour que personne ne se retrouve sur la paille;
J’ose croire que cette fibre, que mes racines ne sont pas anéanties! J’ose croire que tout ce à quoi on assiste n’est que le vent glacial qui saisit, que ce dont on a besoin pour nous secouer, nous sortir de notre torpeur, de cette folie, et nous faire affirmer haut et fort que ce n’est pas ce qu’on a choisi!
Oui, réclamons le maintien, voire la bonification, et sinon la reconstruction des mesures sociales qui nous ressemblent et nous caractérisent en tant que nations. Pour permettre aux plus vulnérables, aux aînés, aux handicapés de pouvoir rester au cœur de nos sociétés.
Oui, Mais aussi et surtout : décidons de nous-mêmes réinvestir, de nous réapproprier de ces valeurs sociales d’empathie, d’entraide, de cette tradition du « tissé-serré », qui ont tricoté nos racines, et qu’il ne tient qu’à nous de réanimer! Et cela, aucun gouvernement ne pourra nous en empêcher.
Bonne et heureuse année! Sous le signe de la solidarité !
Osons comme résolution :
“Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir mais de le rendre possible.”
Connaissez-vous le jeune philosophe français contemporain Alexandre Jollien ? Un homme inspirant au possible! Multi-handicapé de naissance, à qui l’on avait prédit qu’il serait chanceux s’il arrivait à travailler un jour dans une usine de fabrication d’allumettes, et bien cet homme qui ne devait ni parler ni marcher, enseigne maintenant la philosophie à l’université! Marié et père de 2 enfants, il est l’auteur de quelques petits bijoux de Best-sellers, dont « Le métier d’homme » et « Philosophie de la joie ». Il est aussi un conférencier très demandé en Europe.
Un jour j’ai lu cette phrase qui m’a décontenancée…et ma foi, aussi inspirée et touchée. Il racontait qu’il a trois missions dans la vie : celle de philosophe, celle de père…et celle de « handicapé » !!!
« Quel culot! », que je me suis d’abord dit. Peut-on vraiment se vanter d’être handicapé? Une mission n’est-elle pas ce qui devient le moteur de toute une vie? Non seulement il s’attirait le mauvais sort, mais en plus il en rajoutait, en s’affublant lui-même de cette étiquette de « handicapé »! Son affirmation est plutôt choquante, dans un monde où l’influence du nouvel âge rend « politically correct » d’espérer se sortir de cette situation, pour le moins malheureuse et honteuse, et de croire qu’il faut projeter un avenir glorieux et lumineux, ou à tout le moins « normal » !
Alexandre Jollien n’a pas peur de dépasser les limites du possible, de la logique, de la science et du connu… pour ouvrir sur tout un monde de possibilité, même pour les estropiés, les handicapés de ce monde, dont je fais maintenant partie.
(Il me faut absolument ici préciser que mon dieu, je n’aurais jamais osé écrire ces lignes, il y a juste quelques semaines ! Comme si m’inclure dans le club des plus vulnérables, de ces gens qu’on ne voit pas, et qui dérangent, allait nécessairement m’exclure de ce monde « normal », où tous semblent plus beaux et plus heureux… même si j’y étais il y a pas si longtemps et que je sais pertinemment que c’est de la poudre aux yeux ! Fin de la parenthèse).
Et lentement, très lentement, la Vie m’apprend à voir que je peux aussi trouver cette Lumière au cœur de l’épreuve. Au cœur de ce qui me rebute le plus en moi. C’est tout un chemin! Que je ne fais qu’entreprendre. Mais je crois maintenant mieux saisir ce que le philosophe entend par sa mission d’handicapé. Comme si nous, les handicapés (c’est fou comme je n’aime vraiment pas ce mot..), étions appelés, par notre seule présence, à obliger les gens à ralentir et accepter de regarder le plus petit, le plus vulnérable, mais aussi le plus laid… d’abord en soi, puis aussi en l’autre. Et d’arriver à l’embrasser. Pour enfin Vivre, et retrouver la Joie, la liberté!
Notre société en a tant besoin! Au cœur de cette course folle vers le profit, l’autonomie, le pouvoir, l’efficacité, la productivité, on fonce tout droit vers un mur !
En Occident, on n’a jamais vu tant de suicides, de burn-out et dépression… et de victimes d’un système déshumanisant…
Et pourtant… Comme il est difficile et mal vu de se reconnaître et d’accepter qu’on est handicapé, qu’on est en marge du système. Merci Monsieur Jollien !
Ce petit livre visite vingt thèmes qui constituent à mes yeux le cœur d’une vie spirituelle. De l’amitié au zen en passant par la gratitude ou la bienveillance, c’est le chemin du « oui » qui se dessine. Au fond, l’ascèse c’est d’en faire moins, se dépouiller de tout ce qui nous entrave pour danser joyeusement dans la ronde de l’existence. Ce dernier ouvrage essaie d’être un viatique pour accompagner les hauts et les bas de l’existence.
Quel périple que d’admettre que j’ai maintenant cette difficulté à marcher, qui m’a d’abord obligée à me servir de béquilles pour me déplacer, puis ensuite d’une marchette. Ce n’est qu’après plusieurs mois d’encouragements sérieux et d’invitations et d’explications de la part de professionnels de la santé que j’ai finalement accepté d’utiliser une marchette. Ça me repoussait au plus haut point !!! Ça nous classe instantanément dans une catégorie à part : les invalides. Les béquilles sont moins menaçantes: elles sont temporaires. Avec des béquilles, les gens sont d’une gentillesse : soit ils se sentent tout de suite interpellés et font tout pour aider, pour ouvrir les portes, laisser leur place dans la file au supermarché, ou bien ils te racontent comment ça leur est arrivé à eux ou à leur fille ou leur grand-père. Ou ils réagissent simplement normalement. Comme si c’est dommage, mais normal : un accident peut arriver à tout le monde.
Mais quand on nous voit avec une marchette, là on atteint un autre niveau… que les gens ne peuvent simplement pas envisager pour eux-mêmes. Enfin, c’est à mon sens ce qui explique le mur, ou à tout le moins ce malaise à nous regarder dans les yeux. Difficile. D’abord pour moi, d’accepter cet instrument, d’une laideur, qui me donne une démarche saccadée, incertaine, lente… et remarquée!!! Moi qui aimais pouvoir marcher d’un pas assuré, où et quand je souhaitais ! Et surtout d’un pas normal !
Il est vrai que ça me manque de prendre des marches, surtout en nature l’automne, ou dans la neige l’hiver. Et de sentir les muscles travailler, et tout. Mais je crois que là où le bat blesse particulièrement, c’est l’image. Dur d’être maintenant regardée comme si j’étais différente, handicapée. La réaction qu’un bon ami du cégep a eue en me revoyant par hasard après plusieurs années, avec ma marchette, m’a fait tout drôle : il me regardait dans les yeux et n’osait pas du tout regarder la marchette. Il parlait sans arrêt de ce qu’il était devenu. Je sentais chez lui un grand malaise. Et je trouvais difficile de ne pas pouvoir lui partager aussi comment ma vie a évolué depuis le cégep. Les défis de la SP et autres, mais aussi les choses que j’ai accomplies, contre toute attente ! Mais au fond, est-ce vraiment si important, le paraître? C’est fou, comment on accorde tellement plus d’importance au « faire » qu’au simple « être ».
Et puis me voilà maintenant bel et bien confrontée à une nouvelle étape, celle du ouf, du fauteuil roulant. Si difficile à accepter ! Je ne l’utilise pas à la maison : parce que j’en ressens pas le besoin, parce que je veux maintenir ma capacité à marcher, mais aussi parce que ce n’est pas adapté chez moi. Comme mon fauteuil roulant motorisé est dans le garage de mon bon ami et que je n’y ai pas accès directement, je l’utilise seulement à l’occasion. Je dois m’habituer à le manœuvrer.
Il me faut aussi apprendre de nouvelles façons d’entrer en contact avec les gens. Je sens que le fauteuil met un mur. On dirait que je me sens totalement différente, dans un autre monde où l’on ne me regarde plus de la même manière, qu’on ne me voit plus (je sais, je me rappelle d’un temps, où avant mon diagnostic, je ne voyais juste pas les gens en fauteuil roulant. Comme s’ils n’étaient plus partie de cette course folle, et ne me paraissaient donc plus visible… en fait, je ne sais trop…).
Vulnérabilité. Wow, quel chemin ! On nait vulnérable, et on nous accueille, nous embrasse, nous chouchoute. Puis vite, on perd cette innocence qui nous rendait libre… et heureux! Et capable de rire, chanter, danser, aimer sans ce souci de la perfection, sans cette peur tenace d’être jugé et rejeté ! Je sais que mon propre sentiment de ne pas être à la hauteur ou d’être indigne d’être aimée me coupe l’herbe sous le pied, et me paralyse tellement !
J’ai demandé, et je demande encore à la Vie de m’aider à accueillir cette vulnérabilité, et puis pouf! Elle me fait un ptit clin d’œil, l’air de dire : « be careful what you are wishing for ;o) ».
Ne serais-je pas comblée de tout ce dont j’ai besoin pour retrouver cette vulnérabilité? Si la marchette a « frappé fort », je ne m’imaginais pas à quel point l’adaptation à un fauteuil roulant, même à temps partiel, serait tout un défi !
Ni l’attente d’un logement adapté! Un autre des nombreux thèmes sur lequel il y a tant à dire, j’y reviendrai.
Peut-être que la perception des gens sera différente quand j’arriverai à poser sur moi ce regard aimant sur l’être vulnérable, « infirme », invalide que je suis. Mais aussi sur cette jeune femme coquette, têtue, passionnée à mes heures, battante, en quête de communauté, d’entraide et d’éternité.