Pour le commun des mortels je suis que tonnerre qui gronde fort, et crie devant ciel d’orages et d’éclairs
Hérité sur des générations, il gronde, ce tonnerre, ravage tout sur son passage, moi la première ces tempêtes saccagent mes rives périodiquement…
Comme si je me changeais en Louve-garou, Lorsqu’éclate l’accumulation Un trop plein De stress, de peurs, d’anxiété, Face à l’inconnu, au mystère Ou aux trous à combler à mon horaire (de soins) La maladie évolue, misère…
Et je fuis… Puis pouf, Éclate un trop plein d’une mascarade, d’une parade où défilent peur du jugement, auto-censure. Où tout doit rester en surface et surtout pas déranger, Taire ce qui m’habite Vite le couvercle sur la marmite ! Pour fuir mon appel profond qui murmure.
Toute ma vie, j’ai fuis. Les gros mots, les tensions, l’intensité, les cris même ceux enfouis bien profond. Comme tant, je fuis… et me réfugie sur les écrans, ou toute forme d’occupation, ou de bonbon, tout, plutôt qu’oser la rencontre avec le dragon.
Plutôt qu’entendre, essayer de comprendre, tendre la main, apprivoiser cet être, cette bête sauvage blessée… folle, pleine de tendresse, de sensibilité, d’authenticité, de beauté et d’une grande liberté !
Ce dragon fou, rempli de bonnes intentions, d’un feu intérieur qui réchauffe… et de passion… Et aussi truffé de blessures tellement grandes qu’elles bloquent lumière, et chaleur et paralysent.
Nous sommes des êtres de contradiction. Tissés d’ombre et de lumière. La lumière perce et brille chaque fois que j’arrive à embrasser le dragon qui vit en mes profondeurs, chaque fois que j’écoute et improvise un corps à corps avec ces parties de moi qui peuvent me paraître comme noirceur ou malédiction.
Même si c’est le parcours d’une vie, avec la plupart du temps, une relation plutôt chaotique avec la SP et ses défis…et aussi ce cher dragon.
On dit que c’est aux soins apportés au plus vulnérable qu’on peut reconnaître l’état d’évolution d’une civilisation…
Trop drôle, quand c’est là précisément et particulièrement en cette ère où les soins nous sont plus que nécessaires, à toute la société: n’est-ce pas un peu le signe d’une société malade que celle qui non seulement ne prends pas soin des travailleurs de la santé, mais semble parfois même les ridiculiser ou ou à tout le moins banaliser, en avoir marre d’entendre parler d’eux et de de leurs conditions de travail…et de santé ?
C’est un peu devenu comme la légende urbaine depuis l’an dernier, mais je peux, et je tiens à en témoigner : C’est un cadeau, ces aidant.e.s dévoué.e.s qui bravent handicap, maladie… et cette pandémie, ce virus mystérieux qui frappe encore et encore…!
Il y a les auxiliaires du Clsc, qui, parfois vêtus de capes, lunettes, gants, se rendent tout de même au front : osant les visites à la maison, sans savoir si au cours de leur horaire ou route de soins, le COVID ils croiseront…ou non.
Aussi, avec la pandémie, il a fallu, par moments, remanier mon équipe d’aidants de jour/soir (les gens du Clsc viennent seulement le matin), trouver des remplaçants… …le stress est monté, ma tête s’est embrouillée. C’est fou ce que c’est déstabilisant, ça crée insécurité, anxiété, impression de saut dans le vide…
Puis, le miracle, le déclic… un élan de coeur de ma soeur de coeur, une mobilisation éclair de mon réseau, de mon équipe ! un vent chaud digne des tropiques Et fiou! cède la panique … C’est tellement fou comme ça se complique avec ce surcroît de logistique… À en faire croire aux 12 travaux d’Astérix…
Puis, d’un coup de baguette, d’Intouchable (au propre et au figuré), je suis redevenue celle qui est, celle que l’on voit, qu’on ose toucher, parfois même juste avec le cœur ! Juste cette chaleur du ‘’caring’’, de l’élan palpable de prendre soin, de l’amitié qui se tisse au coeur de l’adversité, d’amis précieux qui se soucient et osent ! Avec ou sans gants (mais oui oui, du désinfectant).. Cette chaleur guérit. Elle permet de voir au-delà de l’attirail de fin du monde… Au-delà des gants, des masques, et de cette distance, nécessaires…. Cette chaleur qui m’est tellement, mais tellement chère, et permet enfin de voir clair. De retomber sur mes pieds ( fauteuil).
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« Vaincre la lèpre implique plus qu’une simple lutte médicale », il faut aussi « éliminer la stigmatisation sociale qui accompagne cette maladie pénible » — Peter Turkson
Comme la lèpre, le handicap effraie et éloigne ! Tant de personnes porteurs de handicap et maladies dégénératives sont invisibles…et ou font fuir… et n’ont personne, personne pour qui ils sont précieux. Personne qui voit leur coeur, quand ils les regardent dans les yeux..
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Vraiment, chers aidants et aidantes: de tout coeur, JE VOUS DIS MERCI !!!!
“Il faut encore porter en soi un chaos, pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante”
—Nietzsche
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31 décembre: c’est les émotions à fleur de peau que j’ai vécu le passage vers la nouvelle année.
Il y avait tous ces plans, toutes ces cartes, tous ces mots et ces vœux que j’aurais tant aimé écrire; dont celui-ci que j’espérais pouvoir partager le 31 décembre..ou le 1er janvier… Mais j’étais tellement crevée ! Il y avait aussi mes amis que je n’ai pu joindre par téléphone pour le passage vers la nouvelle année… Ah, et il y avait aussi tous ces trucs..
Mais j’oubliais F, cet intrus qui ne me laisse plus, et fait que de plus en plus, j’ai l’impression de n’être plus que l’ombre de moi-même.. Cette charmante dame de compagnie maintes fois présentée dans mes textes, (pour un portrait bien coquet, par ici:https://lienhandicap.mobi/category/fatigue/) vient sucer tout mon jus, encore chambouler mes plans…Et d’un coup de vent, faire magistralement basculer le moral
Si je me prends à son jeu, je m’embourbe dans un tourbillon sans fin, où je suis victime d’un malheureux destin, où un diagnostic de SP est venu foutre ma vie en l’air, et pas juste un brin. Alors souvent, je me rabats sur ma tablette pour que se taise ce disque brisé, qui me fait entendre encore et encore la même chanson. C’est parfois suffisant pour calmer la tempête et retrouver mes esprits. Mais il arrive aussi que ces fuites ou diversions viennent alimenter des pensées de tout ce que j’ai manqué…
Et je découvre là, maintenant que si, simplement, j’abandonne mes attentes, mes réflexes de fille full performante, multipliant projets, rêves et objectifs…pour humblement reconnaître que mon corps suit plus, et que franchement, c’est peut-être là ma planche de salut: L’occasion parfaite pour apprendre Apprendre à attendre Attendre Découvrir la douceur tendre Suspendre mes impatiences, Oser me laisser surprendre Me laisser prendre et bercer par la vie…
Juste de même, attendre platement attendre encore, confiante que quelque chose est à l’œuvre en moi ou autour, sans que j’aie besoin de tout orchestrer Oui, des fois exaspérée. Respirer. Même quand je me peux plus. Quand j’en peux plus de ce rythme terriblement lent…; Puis, lentement, je deviens moins tendue… Et…wow, je vois poindre le possible…là où tout semblait perdu… là où j’aurais jamais cru !
« Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir des nouveaux yeux. »
—Marcel Proust
cher Michel, mon ami poète, mon frère,
Toi qui a quitté bien avant la pandémie pour rejoindre ta petite planète et prendre soin de ta rose, ton amie, Je comprends tellement l’isolement que tu as vécu et qui t’a inspiré ton projet ‘’Mouvements immobiles’’ (*) !
Avec l’équation fauteuil, système immunitaire affaibli et pandémie, où hors de mon quartier toute sortie
devient aventure, excursion, voire parfois folie.. Imagine-toi qu’avec le confinement, l’univers entier s’est vu confronté à une réalité qui jusque là nous était réservée à nous, faible minorité : L’IMMOBILITÉ !
Et on a vu surgir partages de photos, d’images et vidéos pour garder contact, tisser des liens, réinventer le voyage, rencontrer l’humanité ! Tu sais, j’aurais tellement souhaité donner du souffle à ton projet ’’Mouvements immobiles, mais je manque de souffle…Puis vint…2020 à la rescousse ! Drôlement, cette année je suis arrivée à vivre à nouveau cette joie des rencontres, des voyages, et images, devenus tout à coup accessibles grâce aux réseaux sociaux ! Quel cadeau de voir, entendre, parfois même sentir les richesses de ce monde à travers le regarde cet autre qui me fait découvrir, m’émerveiller, me surprendre, me choquer ou pleurer, toujours me faire grandir, et remplir mon baluchon de couleurs, d’images, de mille et un visages et paysages ! Je saisis l’occasion pour exprimer toute ma gratitude à celles et ceux (je pense particulièrement à Denis, François, Fannie, Annie, Nina, Joëlle, Léti, France, Monique, Amélie, Jonathan, Juan Carlos, Naliana…:) qui osent partager en direct (vive Facebook, Facetime, Skype, Zoom, WhatsApp, etc) ou en différé une vitrine sur le monde, sur tant de beautés, de réalités !
Merci de rendre accessibles toutes ces découvertes et aventures ! Et permettre cette rencontre qui garde vivant, et même, donne vie! Me sentir solidaire. Unis dans cette adversité. Et me donner envie de plonger dans mes profondeurs, et partager à mon tour des paysages…Créant, ou même juste en devenant moi-même vitrine vers un ailleurs, tourné vers le dedans. Et/ou juste refléter ton intérieur.
Je te laisse avec ces mots qui éveillent mon sourire, et je suis certaine, auraient trouvé écho en toi aussi: « Les plus grandes aventures sont intérieures »—Hergé « Aussi vaste que l’espace qu’embrasse notre regard est cet espace à l’intérieur de nous. »—anonyme « Là-bas pour moi, la vraie vie ; ici, en France, le quotidien que je veux fuir à n’importe quel prix. Il en résulte une douloureuse tension entre ces deux pôles. Un jour de miracle ordinaire, je réalise qu’ici, c’est partout, et que partout, c’est ici ! Je cesse alors de m’inquiéter, de tout diviser, et d’isoler le voyage du non-voyage, le spirituel du profane. Rien n’est jamais fermé sinon nos propres yeux… » –Jean-Pierre Brouillaud, aveugle globe-trotter, poète, écrivain au parcours de vie atypique riche d’expériences et de cheminements intérieurs : riches trouvailles que sa page FB, sa chaîne youtube ou son blog !
**** (*) Tes mouvements, déplacements, sorties devenus difficiles et rarissimes les derniers temps de ta vie t’ont inspiré ce projet fou, que toi seul pouvais imaginer.et oser mettre en oeuvre. C’est comme si tu avais eu une intuition profonde, comme un écho: la portée inattendue, même incognito, de ton projet génial: ‘’Mouvements immobiles’’: tu avais invité, avec ton sourire qui marque, tes amis artistes et leur contacts, à te faire une ptite place dans leur malle compacte et à t’emmener en voyage En te partageant plein d’images Sous forme de photos, dessin, peinture ou collage de vacances, de divers horizon, de nature. Images sur des briques que tu allais monter sous forme de mur pour colorer ton quotidien, t’emmener un peu à l’aventure.. Mur qui allait être coloré à l’endos de ta belle poésie
Depuis des jours,
je me sens si impuissante
face à toutes ces souffrances, ce chaos, ce mystère…
Même à retardement, je tiens à dire que je suis profondément solidaire
de Jonathan dans son campement face au parlement
et de tous ces gens à Beyrouth au Liban.
Et tous ceux ici, vivant dans leur chair le trou béant,
les failles légendaires
d’un système de santé à la dérive depuis des années,
où l’on ‘’parke’’
trop d’aînés et de handicapés
dans les CHSLD
et privant
celles et ceux souhaitant
rester à la maison.
Les (nous) privant d’un financement suffisant
pour des soins adaptés nous permettant
de juste rester actifs et contribuer à la société,
de rester VIVANT !
Et je me demande souvent: Comment?
Comment
enclencher un vent de changement,
bien au-delà des mots souvent impuissants..
Comment semer à tous vents
un élan de solidarité, d’empathie,
mais surtout et aussi,
ce ptit coup de pied là où on s’entend,
pour se mettre en mouvement:
réclamer du gouvernement
de bouger, d’écouter, travailler avec les gens affectés..
Merci Jonathan Marchand
Et à tous les gens appuyant la cause, qui agissent, militent, aident
pour un changement de fond
et du financement !
Pour mettre en marche le programme d’assistance personnelle
pour des soins à domicile
ces soins dont j’ai besoin pour pas seulement
pouvoir manger à mon rythme et à mon heure,
ou me lever, m’habiller, être entourée de mes plantes et fleurs,
mais aussi de dessiner, peindre, écrire, être active dans ma communauté…
Il est temps !
D’arrêter de boucher les trous,
et voir tout le tableau,
the big picture
et s’inspirer aussi de modèles conçus et bien vécus ailleurs.
Ou même dans une autre province, à 2 sauts de chez nous !
Des exemples qui se révèlent plus viables,
économiquement parlant..
J’en appelle à l’humanité,
à un peu de solidarité
et d’engagement de toi, de moi, du grand nous commun.
Merci, Jonathan, et aux efforts de la part du gouvernement
Pour une entente
Incluant aussi des mesures
Pour le personnel soignant débordé,
À bout de souffle,
Vraiment!
Confinés depuis des lunes à cause d’un handicap, d’une maladie chronique invalidante, ou du vieillissement..
Mais bon.
Ah, mais surgissent prises de conscience de certains oubliés,
De certaines lacunes des chsld, du système de santé(*),
D’un monde entier à repenser…
Au-delà des ressentis et des apparences,
Nous sommes tous profondément liés !
Là où des milliers de gens réapprennent à connaître vraiment
conjoint, enfant, parent,
découvrent le sens et la portée de la présence
…les vagues, subtilement,
Finissent par atteindre et abreuver
d’autres rives..comme les miennes
ravagées par de trop longs hivers..
Je découvre aussi vraiment toute l’importance de la présence..
La richesse, la chaleur, le bonheur de liens
qui se tissent ou se resserrent au fil de rencontres à distance…
Toutes ces rencontres maintenant rendues possibles en ligne ou sur Internet (travail, bien sûr, mais aussi rencontres de dessin, paroissiales, médicales (inter-région, c’est génial ! ):
un pan de vie redevient accessible !!
Une nouvelle vie redevient possible !
…et puis LE VERTIGE: pour combien de temps ??
Si après, tout redevenait comme avant ??
Je souhaite tellement que toutes ces nouvelles ressources développées et rendues disponibles
-pour des rendez-vous médicaux plus pointus et en temps ‘normal ‘ difficilement accessible (car à 2h de route),
-ou pour se sentir partie et même participer à la vie de la communauté,
-ou encore pour maintenir ou tisser des liens..
Je souhaite vivement que tout cela puisse continuer à être accessible dans l’après Co-vid pour celles et ceux pour qui le confinement continuera…
Quand l’isolement redeviendra l’exception,
Que cette réalité tout aussi difficile
qui ne sera plus partagée par la masse mais juste par les plus fragiles,
les sans noms.
J’espère qu’on se souviendra…
Svp, svp, svp! Apprenons de ce présent !
Souvenons-nous de ceux qui continueront à vivre l’isolement,
illustration de manu
même au retour du printemps.
Svp, svp, svp, rappelons-nous et maintenons
cette vague de chaleur,
et ce soutien aux plus vulnérables,
isolés, et aussi à leurs aidants !
Récupérons les fruits, les lumières de ce momentum :
choisissons d’en faire notre héritage,
nos nouveaux acquis,
pour inclure au passage
dans cette nouvelle communauté mondiale plus soudée
Tout comme le mouvement du pendule ou la valse des saisons,
Je m’identifie tantôt aux maux et mots de mon ami poète Michel Pepin, (qui avait aussi la SP):
« Je ne connais plus rien d’autre que la faiblesse de mon corps
Je suis resté assis j’ai pleuré
versé mon délire sur le plancher
Puis je suis resté assis sans mot
À l’écart de mon corps souffrant
Essoufflé par le tapage incessant
D’un trop lourd silence solitaire
(…) »
la danseuse et chorégraphe Stephanie Bastos, (Photo: Robbie Sweeney, tirée du site du D.I.R.T. Festival)
Et à d’autres moments, et parfois même simultanément, je vis totalement et me sens vibrer ou couler dans mes veines cette réalité que dépeint Philippe Pozzo di Borgo (inspirateur du film Intouchables):
« J’ai brusquement perdu ma fonction sociale et j’ai sombré dans l’inutilité.(…) Dans l’expérience de cette fragilité que je vis depuis (plus de 20 ans) dans la rencontre avec Abdel qui était porteur d’un autre handicap, tout aussi réel et douloureux(« asocial et fraîchement sorti de prison »), j’ai découvert l’espérance. Ce n’est pas l’espoir d’une vie meilleure plus tard. C’est un second souffle qui remet en selle, qui permet d’avancer avec une respiration plus solide, comme celle qu’expérimentent les coureurs de fond, et de vivre pleinement sa vie d’handicapé. »
Philippe Pozzo di Borgo, dans le livre Tous Intouchables?
Nous sommes des êtres de contradiction. Tissés d’ombre et de lumière.
La lumière perce et brille de tous ses feux chaque fois que j’arrive à embrasser le dragon qui vit en mes profondeurs, chaque fois que j’écoute et improvise un corps à corps avec ce qui en moi est perçu comme noirceur ou malédiction..
Même si c’est le parcours d’une vie, avec la plupart du temps, une relation plutôt chaotique avec dragon, SP et leurs défis..
« (…)parce que tous les nuages du monde n’empêchent pas les pleines lunes »
—Grand corps malade
photo tirée du site Unsplash
Maladie et handicap nous font vraiment tous grandir.. dans nos façons de vivre et ressentir, aimer, voir et communiquer.
Ça m’a touchée quand, suite à mon dernier article, une amie m’a offert de voir si elle pourrait créer quelque chose de plus confo..ou en tous cas améliorer le modèle des culottes…et ça m’a aussi fait craindre que mon texte ait pu être perçu comme si la SP (ou SEP) est TROP difficile ou qu’on y lise ‘’cette saloperie de sclérose en plaques’’, tel que la présentait un article paru dans un grand quotidien ces dernières semaines…
Le journaliste parlait d’un futur auteur atteint de SP, que j’étais heureuse de découvrir. En fauteuil motorisé, cet homme incroyable arrive à écrire sans l’usage de ses mains. Est monté en moi juste le goût de lui dire wow! Chapeau! Tu m’inspires!..et de lui dire aussi que ça m’a fait vraiment chaud au cœur de lire qu’il se promène chaque jour en forêt (les promenades en forêt me manquent beaucoup, depuis que je suis en fauteuil) !! C’est ce que j’ai retenu de l’article. Qui parlait aussi du fait qu’il doive maintenant vivre en CHSLD, même à moins de 50 ans… Et de l’isolement qui s’ensuit…
J’essaie de comprendre ce que cet article est venu tant remuer en moi. Il y a évidemment la peur que la fatalité soit l’arrière-goût amer qui reste après la lecture de mon dernier texte publié sur mon blog. Qui parlait de la culotte.
Des mots comme: « (un homme de), 47 ans, prisonnier de son corps, ne choisit plus grand chose » me font aussi peur que je me mette (ou qu’une autre personne ayant la SP ou nos proches en vienne) à associer automatiquement SP et souffrance et malheur extrême, fin des jours heureux, des projets, de réalisation de ses rêves et passion..et mission…fin de vie, quoi!! Que ces mots devenus maux en viennent à nous définir…
image puisée sur le web
J’aimerais tant montrer un visage de la SP, du handicap ou de toute vulnérabilité qui soit moins noircis au gros marqueur!
Et je sais, je sais, ça peut paraître loulou, fleur bleu ou insouciant..ou même déconnecté…soit, j’assume !
On a aucune prise sur la façon dont le lecteur comprendra ou recevra un texte.
Chacun perçoit la vie, les gens, les tuiles qui lui tombent sur la tête ou les belles surprises selon les lunettes (peurs, histoire de vie, relations…) qu’il porte.
Et trop souvent, quand on parle de maladie ou de handicap (et des gens qui le vivent), les mots utilisés sont conditionnés par la peur ! Ou perçus à travers ce même prisme.. et c’est blessant.
J’ai vécu la douleur de l’impuissance devant les souffrances d’amis proches ou moins proches, souffrances menant au décès…même à mon âge, et des complications liées à la sclérose en plaque ou de cancer.. Maladies et souffrances que j’aurais voulu leur arracher..
Et combien de larmes ou mots durs avalés ou cachés derrière un sourire, une caresse pleins de chaleur et d’espoir, de soutien..aussi..pour dire combien je crois en la personne, en sa force, toute la lumière qui l’habite..au-delà de maladie ou épreuve…
Me rappelant que pour moi, toujours, les encouragements, sourires, mots justes et vrais, teintés de chaleur et/ou remplis de confiance m’ont donné des ailes! Même s’ils ne m’ont pas guérie.
Je vis avec cette maladie depuis 22 ans. Et suis aussi en fauteuil motorisé. Et oui, il y a des moments vraiment pas faciles..
Mais qui n’a pas de défi? Qui peut se vanter de ne vivre aucune épreuve? Il est clair que certains sont plus apparents que d’autres… Et évidemment plus dérangeants, socialement aussi, on s’entend.
J’ai jamais souhaité avoir la SP, (dès le diagnostic, j’avais une peur bleue du fauteuil roulant: j’étais assurée que ce serait ma mort si un jour..et ceux qui me connaissent pourront, je l’espère, témoigner que je suis toujours bien vivante, même si beaucoup moins active, fatiguée, et affectée de plusieurs façons par la sclérose et le handicap..
La vie n’est pas rose bonbon. Ni QUE noire. Pour personne. Mais maladie, handicap, perte d’autonomie ou autre défi comportent aussi leur lot de grâces insoupçonnées, pour peu qu’on puisse les percevoir..même quand elles sont particulièrement bien planquées (comme en parle Grand corps malade).
De plus en plus, je vois à quel point tout est question de perception.
Le fameux verre à moitié vide ou à moitié plein..
Ma trouille du fauteuil roulant (épée de Damoclès qui me pendait au-dessus de la tête dès le diagnostic ) m’a fait fuir les personnes en fauteuil … ces personnes qui étaient pour moi devenues invisibles parce que je projetais sur elles ma peur..
Nos perceptions (trop souvent reflet de nos peurs que l’on projette..) et nos façons de les communiquer ont un tel impact !
Il y a rien de tel que la chaleur de des encouragements et des sourires ! Et de l’amour et de l’amitié.
Au travers la maladie, il y a la Vie !
Il y a les nouvelles mission et rêves qui prennent forme. Même différemment, même de façon boiteuse ou lente, ou maladroite…
Il y a aussi l’entraide qui change des vies !
Qui change la mienne: ces mots m’ont presque fait oublier le cadeau inestimable de pouvoir rester chez moi, dans mon logement, grâce au soutien inespéré d’une petite communauté, sans qui mon regard sur la réalité serait bien différent ! Mille mercis encore et encore.
Merci tellement à ceux et celles qui osent voir les fleurs qui poussent à travers le béton! Reconnaître la Vie en la personne, mettre de l’avant ses réalisations ou juste même ses bonnes journées ou ce qui la fait vibrer plutôt que de parler de ‘’salopererie de maladie’’.. Merci à ceux et celles qui osent dépasser la laideur du fauteuil ou des culottes ou de la fatigue extrême pour voir la personne, une amie, une personne à part entière qui oui, a un handicap, mais contribue à sa mesure, même bien différente, à sa communauté.
crédit photo: François Roy
Merci mom, et mes ami-e-s et ma famille pour votre précieux soutien, amour, et aussi de me voir avec SP et fauteuil (bien difficile à cacher…), mais aussi, bien au-delà!
J’ai ici une pensée toute spéciale pour mon ptit p’pa, qui a toujours eu la force de m’encourager, au fil des différents deuils, et même eu le courage (à l’époque, je parlais plus de culot…) de m’apporter (sans me consulter) ma première manchette… Je lui en ai voulu…même si je savais que c’était pour m’aider..et que ce devait pas être facile pour lui… en fait, aujourd’hui je suis certaine que son cœur de père saignait en dedans..mais son geste me disait: vas-y! J’ai confiance en toi!
Peu nombreux encore sommes-nous à vivre, chaque jour,
et quatre fois plutôt qu’une,
le défi de la culotte:
dont voici l’histoire (ou l’anecdote):
Pour pallier sa vessie
qui ne répond plus pour cause de maladie,
la sorcière Mai a choisi
d’oser porter des culottes,
question de pouvoir continuer ses pérégrinations.
Or, malgré la patience et persévérance, et les bonnes intentions
de ses aidants, et même ses propres incantations,
force lui est de constater que cette invention est de la pure fumisterie à la con !!
Conçue pour faire monter toutes sortes de jurons!
Pour les incultes,
(la majorité chanceuse des adultes),
permettez-moi de vous mettre un peu au parfum
(je vous dis tout de suite:
toute apparence de jeu de mots est fortuite),
les charmantes culottes d’incontinence
sont d’une apparence tendance
à la bonhomme Michelin…et, quoi de mieux:
d’un confort des plus douteux.
Qu’importe que l’on soit une femme de petite taille: la super culotte parachute (qui est, semble-t-il, la plus absorbante..mais qui oblige quand même à y ajouter un pad pour éviter les fuites), fait trop souvent entre les 2 jambes l’un de ces paquets, dignes de rendre jaloux le mieux nanti des étalons..
Ainsi, je vous dis pas l’innommable patience:
Impossible de passer sous silence
les dons, talents et tours des précieux auxiliaires de la sorcière
pour lui assurer un minimum de confort..
Pas facile, elle qui a la peau si fragile…(elle jalouse les crocodiles ..)
Très souvent, on doit faire des pieds et des mains, faire preuve de patience, de persévérance, de compassion, d’empathie..développer dons et pouvoirs magiques !
Quelle chance: l’univers a envoyé au secours de la sorcière Mai une équipe volante fort sympathique !
Des gens dotés ou qui ont développé et/ou affiné des pouvoirs empathiques,
qui permettent à Mai de continuer à voler, au-delà de toute logique 🙂
***
Merci tellement à tous les anges mes amis
pour cette patience qui me touche au plus haut point ! (Margareth, Dan, Marcel, Daniel, Suzie, Marie, Livia, Christiane, Michel, Alexandre, les anges du matin (auxiliaires du CLSC))
Merci d’accepter ce petit geste de plus, et de m’aider à me sentir le plus confortable possible,
mais aussi de me sentir quand même coquette et bien dans ma peau et prête
à reprendre au quotidien l’épopée, et monter mon balai brisé !
« La Vie, nul ne l’a jamais vue, c’est le corps qui nous la fait connaître. »
—Jean-Yves Leloup
Avant l’arrivée de la SP et de la perte de mobilité et autres symptômes, mon corps, qui, ma foi, me permettait tant de choses dont je ne réalisais pas la portée, mon corps, cet allié précieux plutôt discret et agissant dans l’ombre, je réalise en écrivant ces lignes qu’il était un peu comme ce véhicule plutôt fiable pour m’amener à bon port.. et parfois une enveloppe me remplissant de joie, les jours où je me sentais belle et bien dans ma peau..
S’était installé un rapport de nature surtout utilitaire..mais il prenait aussi la couleur évidemment de vecteur de plaisir, d’amour, de tendresse, de chaleur, …mais soit, c’est sa job..!
Puis quand une panne majeure a surgi, sont vite montés dépression et colère contre ce véhicule qui me lâchait!
J’appréhendais et craignais tellement le fauteuil roulant… qui, j’en étais vraiment persuadée, signerait mon arrêt de mort!!! *
(*)c’est tellement le message de plus en plus véhiculé dans le monde !!
Puis, lentement j’ai eu l’élan de sortir le drapeau blanc. Besoin de faire la paix. Voir et vivre mon corps comme un allié, une partie sacrée de mon être, quelles que soient sa condition, sa taille, son vécu.
Mais quel défi ! Surtout quand un de ses membres ne répond plus, fait la grève, ou démissionne… après toutes ces années à me porter. Cet aidant, cette enveloppe, cette partie plus vulnérable et changeante de ma personne que je découvre, je sens l’urgence de l’intégrer, avec ses faiblesses, tout ce qui ne répond plus comme avant..et qui m’énerve.. bref, vivement l’harmonie!
peinture de Frédérique Lemarchand puisée ici: https://lemarchand87.skyrock.com/
Le corps est ce trésor de tous les trésors, trésor infiniment précieux dont l’esprit humain ne peut saisir qu’une infime partie… tour à tour admirée, désirée, enviée, méprisée, rejetée, violée, violentée, ignorée… et parfois bénie…
très peu soupçonnent le corps d’être un tel trésor… immensément inimaginable, sans limites et sans contraire, source intarissable du très profondément, intensément, infiniment et éternellement Vivant, qui fait pâlir les contes de fée les plus fous.