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vague à l’âme

Parce que c’est plus facile de partager ses états d’âmes ombragés quand se pointent enfin des percées de lumière et d’énergie, je partage aujourd’hui ces mots qui m’habitent, transitent et qui dansent en moi depuis trop longtemps maintenant. Non pour répandre cette noirceur, mais plutôt un peu pour partager ce que vivent plusieurs personnes à roulettes (et j’imagine aussi tant d’autres personnes…), mais surtout pour dire courage ! Tenez bon !   Même après ce qui peut nous sembler une éternité, la lumière nous revient, même si on doit parfois parcourir tout un chemin, traverser mers et marées avant que la lumière puisse se frayer un chemin en nous et percer !

Extrait de mon carnet de voyage :

vague

crédit photo : Moovanse

J’essaie, oui, j’essaie de changer le regard sur le handicap ! En fait, je souhaiterais tellement qu’on l’oublie tout le temps, ce fauteuil, qu’il devienne invisible !!! … Et d’abord, tout d’abord pour moi !!!!
Zut !!
Et puis s’il y avait que le fauteuil !  Bah non, y a aussi la chère maladie, SP de son prénom, qui vient trop tout foutre en l’air !!!

Par exemple, les intestins et la vessie qui, comme le font tant d’ados ou de rebelles à toute autorité, perdent tout signal ou coupent contact avec la tête, font ce qu’ils veulent et ignorent les besoins de  l’ensemble !!!
Ça te bousille une journée quand ils décident de faire la fête !! Et dois-je dire que Madame (vessie) ne se gêne pas pour célébrer et aime les fêtes bien arrosées !

Concréto: on fait quoi quand ils décident de se vider avant d’arriver à la toilette ? Et que ça me vide complètement de mon énergie ? (*)
Ces moments où je me dis que je devrais peut-être envisager d’aller habiter dans un endroit comme Logements intégrés, organisme offrant des logements où il y a du personnel pour aider aux soins d’hygiène et habillement et autres. Mais c’est tellement loin de mon milieu !!!  🙁

ET surtout, j’aime vraiment mon logement en coop (où j’habite depuis 20 ans), près de tout et surtout de mes amis, et d’un réseau social, non négligeable pour ma santé mentale !  Et si c’était peut-être le déclic dont j’avais besoin pour relancer mes explorations sur le thème du vivre ensemble ?

Ouf ! Ces jours-ci, fatigue, infections et tout le bazar qui semblent traîner depuis des lunes, et la solitude et le désœuvrement qui suivent me pèsent trop.. et font broyer du noir..
re-Ouf.
Et d’où vient cette colère ??
Besoin d’être à l’œuvre et de sentir la communauté…

Et puis monte aussi parfois en moi l’élan d’avoir un amoureux à coller, à aimer, avec qui refaire mer et monde… même à une échelle bien réduite, cheminer et grandir… mais il y a trop souvent ce bouillonnement d’émotions et de colère qui montent et me hantent… et donc me semble que c’est pas possible… Aussi, la question de TDVTMDÉ (**) me gêne beaucoup… Et il y a l’énergie qui me manque pour m’habiller ou me coiffer toujours comme je le souhaiterais.. me sentir belle…

De toute façon, j’ai tellement d’abord besoin de trouver en moi cette lumière, cette paix, cet Amour, cette tendresse pour pouvoir venir les offrir !!!! Tellement !!!

bouteille-mer

crédit photo: Boulevard 69

Univers, stp, stp, stp, aide-moi !!! Je peux pas y arriver seule !!! Et je sais pas quoi ni comment, concrètement, avec ce manque d’énergie constant !! Chère AC, vous qui avez quitté ce monde, je vous envoie aussi ce message : je me sens souvent indigne de vous, mais je sais que vous avez dit que vous alliez nous aider, alors je vous demande, svp, pendant que cette infatigable lenteur me hante, que isolement, fatigue, faiblesse deviennent pendant des jours, des semaines et parfois des lunes mon quotidien,  svp donnez-moi votre résilience. Mais encore plus. : Svp, donnez-moi votre foi et surtout votre incessant désir et courage d’oser tenter initiatives et démarches pour aider, accompagner, accueillir et écouter ceux qui vous entourent, de près ou de loin ! Même à la vitesse de la tortue. Avec un rythme et une énergie réduits, et aussi la maladie et les autres défis de la vie !
Mon sentiment de ne pas être à la hauteur m’a tellement toute ma vie empêchée de vivre, de bouger…et jusqu’à me paralyser !!!

Merci la Vie pour le courant qui porte toujours nos messages, nos cris du coeur.. Merci pour le retour du soleil, de l’énergie, de la vie !

***
(*) Va encore pour la vessie, même si je dois préciser qu’après avoir exploré les différentes possibilités plusieurs fois avec une urologue spécialiste réputée en neurologie que j’ai rencontrée plusieurs fois A des centaines de kilomètres de chez moi, les très sexy culottes d’incontinence sont devenues mes alliées. Mais dois-je ajouter que c’est loin d’être mon choix, Et qu’elles ne sont pas infaillibles ?

J’ai aussi envie (ok, j’avoue que drôle dans le contexte J, mais promis : tout jeu de mots est fortuit) d’ajouter cette parenthèse au sujet de l’incontinence :

Comme c’est fou toute la gêne et la honte à juste prononcer ces quelques lettres !… Je connais trop de personnes pour qui l’âge ou la maladie (que l’on parle de SP, d’ACV, et quoi encore) joue des tours : quand la vessie ou les nerfs lâchent, disons que ce n’est pas la joie ! Tant de gens prennent personnel cette défaillance du corps, comme s’ils en étaient responsables ou même coupables !
Zut ! … Cette folie qui conduit même à ne pas vouloir admettre la situation, et surtout ne pas prendre les moyens pour tenter d’y remédier…
Certes, il n’existe encore aucune solution miracle, mais il existe à tout le moins des moyens de limiter les dégâts !
Et j’invite tellement tous ceux et celles qui sont affectés par les troubles de la vessie à oser consulter, et explorer les différentes avenues pour se sentir bien dans son corps, mais aussi pour être à l’aise de sortir !

Quand on y pense : c’est drôle comme ce sujet est tellement banal quand il s’agit des enfants ! Ni eux, Ni la société ne se posent de question ! C’est une réalité avec laquelle on arrive à composer… même si on peut souhaiter qu’elle soit temporaire !
Et pour ce qui est des fuites de mes amis les intestins, heureusement (!!!) elles ne sont qu’accidentelles et occasionelles. En fait, très souvent causées par mes choix alimentaires (voilà donc, pour les sceptiques et les curieux, le secret de la Caramilk, ou l’une des raisons expliquant mon alimentation particulière.

(**)Trouble De la Vessie Tout de Même Drôlement Énervant

VOYAGE MiragE, OU Quand les préparatifs pour un petit voyage en province,  à quelques lieues de chez soi, deviennent les 12 travaux d’Astérix…

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Je vous partage la première partie d’un article entrepris il y a  3 ans, alors que la marchette était devenue une aide essentielle à la marche.

 Préambule

Ça fait tout drôle de se retrouver sans voiture, sans permis… Surtout quand ça vient rendre compliquées, voire improbables, les escapades hebdomadaires hors de la ville, chez des amis…ou encore la joie toute simple de pouvoir juste partir au loin quand j’en ai envie ou quand j’en ai besoin !

États d’âmes quand je vois l’annonce d’un événement auquel je voulais tellement participer :J’me sens pas capable d’écrire… j’ai cette boule qui presse ma poitrine… J’me sens encore prise chez moi…Zut ! J’aimerais donc pouvoir y aller, à Québec ! Au congrès auquel je me suis inscrite ! J’aimerais donc juste pouvoir y aller sans chichi, sans toutes ces multiples et interminables démarches et recherches… Sans avoir à passer au travers des 12 travaux d’Astérix …

Liste (peut-être même pas exhaustive) des démarches effectuées dans l’espoir de pouvoir m’y rendre :

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 Train :

Pas mal : j’apprends qu’on peut avoir droit à un accompagnateur gratuit si l’on a une lettre de médecin justifiant le besoin d’un accompagnateur (voir les détails plus bas).

 1- J’écris donc un mot à mon médecin pour lui demander une énième lettre, cette fois pour justifier le besoin d’accompagnateur pour le train.

2 -Vérification des règles, horaires et tarifs pour voyage à Québec en train… en fauteuil roulant : d’Ottawa, il y a un arrêt d’une nuit à Montréal :

3- Ce qui veut dire d’autres frais et d’autres démarches pour trouver de l’hébergement abordable, ou à tarif très réduit (tous n’ont pas la chance d’être couvert par une assurance-invalidité) qui soit adapté et pouvant accueillir un fauteuil roulant;

 4- Et je me dis que pendant que j’y suis, je pourrais visiter ma cousine à Ste-Hyacinthe … Aĩe ! Là je n’avais pas idée du périple entre les différents services de transport adapté de chaque région ! On ne peut pas juste aller de Montréal à Ste-Hyacinthe avec le transport adapté de Montréal. Non. Il faut prendre celui de la STM pour une partie du trajet, puis transférer dans un véhicule du transport adapté de la région la Mascoutaine…($$$ de plus, et besoin de s’inscrire comme visiteur…), qui ne se rend même pas à St-Hilaire (j’en aurais profité pour aller dormir chez des amis où c’est un  peu accessible…), ville couverte par encore un autre service (autres $$$, et autres démarches d’inscription comme visiteur) !!!

Ouf, alors disons que ces seules démarches m’ont pris quelques jours avant d’obtenir toute l’info… et m’ont plutôt pas mal beaucoup fatiguée et découragée !!!

5 -Ah oui, et je me suis aussi inscrite comme visiteur au service de transport adapté de la région de Québec, et à celui de la Mascoutaine. Au cas où mon plan fonctionnerait.

Bus :    

6 – J’explore du côté du bus : je recherche, remplis, et faxe le formulaire et joins lettre du médecin pour avoir droit à un accompagnateur gratuit…pour noter après que ça prend 4 à 6 semaines avant de recevoir une réponse;

Aussi, il faut réserver une semaine à l’avance pour voyager avec un fauteuil…

 La compagnie Orléans-Express offre le transport de Montréal à Ste-Hyacinthe. Mais les heures ne correspondent pas à mon horaire pour ce voyage-ci.

Covoiturage :

J’ai le goût d’explorer aussi de ce côté, même si ça peut sembler très peu probable avec un fauteuil roulant. J’ai toujours beaucoup aimé voyager en covoiturage : pas cher, sans chichi et permet de faire de belles rencontres !

 7-Appels : – Kéroul : n’ont entendu parler de rien en ce sens, et me demandent de les informer si je trouve quelque chose;

-Société de SP de ma région et d’une autre région qui n’en ont pas non plus entendu parler, mais proposent d’afficher une annonce sur Facebook;

 8-J’annonce sur ma page Facebook, et sur la page de la société de SP.

 Cette étape m’a été difficile ! J’ai toujours eu du mal à demander ! ET aussi à afficher que je voyage avec un fauteuil roulant. Ouf, je sais que ça dérange, et qu’on risque de grincer des dents chez ceux qui me connaissent… ou peut-être d’abord aussi pour moi ! C’est la première fois où je suis confrontée à l’ampleur de la tâche (titanesque!) que représente la planification d’un voyage seule, avec un fauteuil roulant. L’accès est tellement peu développé ! C’est décourageant. Aussi, je me prends la tête à essayer de penser à comment je pourrais fonctionner juste avec un fauteuil : pour aller aux toilettes, par exemple (vais-je toujours en trouver qui soient adaptées ? Comment faire chez des amis où le fauteuil n’entre même pas dans la salle de bains, et où il n’y a évidemment pas de barres d’appui pour m’aider à me relever sans chuter ?), ou encore pour me lever du lit, m’habiller, etc., etc., etc..).

 Bon, revenons à Astérix. Les démarches :

 9 -J’annonce aussi sur kijiji pour chercher du covoiturage en voiture accessible. 

À suivre…

Oui, la solitude tue !

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crédit photo: Entre deux roues

 

Pas facile, je trouve, d’étaler sa solitude au grand jour, surtout quand on la vit plus intensément ! (comme l’hiver, quand il est difficile,voire impossible de rouler en fauteuil roulant)..Pourtant,
je sais qu’elle est aussi le lot de tant de personnes vivant avec handicap, maladie, vieillissement ou toute autre forme de vulnérabilité. Qui effraient tant!

En cette veille de ma participation au forum social mondial, à un atelier sur le vivre ensemble (http://www.larche.ca:8080/fr_CA/nouvelles?article=336377&title=le-vivre-ensemble-pareil-pas-pareil-et-notre-kiosque-au-forum-social-mondial), j’ai envie de partager un des articles que je garde en réserve depuis plusieurs mois. Juste pour rappeler que  les apparences sont souvent bien trompeuses ! La solitude, parfois ressentie de façon aiguë, peut parfois être vécue par des personnes ayant un réseau social bien portant. Rassurez-vous, ceci n’est pas un cri d’alarme personnel (merci la Vie, j’ai un été bien rempli), mais plutôt une invitation à regarder autour de nous, à oser téléphoner à un proche malade ou âgé, à visiter un voisin nouvellement arrivé au pays.. ou encore une personne vivant en situation de handicap.. Et aussi alimenter une réflexion sur la nécessité criante de créer de nouveaux milieux de vie incluant aussi les personnes vulnérables,, différentes, et qui semblent bien loin de nos univers…

***

Oui, la solitude tue ! Elle coupe le souffle.

Passer un super dimanche ensoleillé en dedans. Encabannée. Je ne peux pas aller là où je voudrais, à cause du stationnement (toujours rempli aux heures d’affluence) qui bloque l’entrée. Parce que anyways, en panne d’énergie. Et pas de but ou de personne à rejoindre ailleurs.. Pas de projet sur lequel travailler avec d’autres non plus..

Faque j’ai essayé de continuer à écrire à une personne qui m’est chère. Encore. Sans réussir à finir.

Pis évidemment, aussi me sont enfin venus les mots pour écrire à deux grands amis … mais juste pas l’énergie de prendre le crayon, le clavier ou même le dictaphone…

La solitude. La noirceur, la nuit, je vous dis…

Ouf!

Je veux offrir cette boule à l’univers. La solitude pèse vraiment lourd ce soir. Pas capable de regarder trop d’émissions, de films. Ou de Facebook. Besoin viscéral de vrai! De contacts. De nature. De juste rouler dans l’herbe, sentir les feuilles, courir avec un chien. Faire du ski de fonds. Dans la forêt !! Ok, ben à tout le moins être dans une forêt enneigée, sous les étoiles !

Besoin oui ok de la vivre et de l’embrasser cette solitude.. au dedans de moi. Je sais tellement pas comment, surtout quand cette fatigue me colle à la peau, quand le handicap me bloque l’accès à tant d’endroits où il fait bon se ressourcer et se retrouver…. cette maladie qui me coupe des autres… et aussi de moi-même!

Le fait d’être enfant unique n’aide pas beaucoup. Je me suis souvent sentie seule dans ma vie !  Mais au moins, en marchant, et avec mon auto, je pouvais me promener, aller voir du monde aller dans la nature, en campagne, chez des amis !!

Et oui, je pouvais me sentir quand même seule. Mais ça tue, de ne pas pouvoir sortir. D’être toujours fatiguée. De plus avoir de but. Je me sens trop inutile. Et comme juste du vent. Un bibelot. Qui a juste mauvais caractère.

Ouf, besoin d’être à l’oeuvre !!!!! J’ai eu beau dessiner près d’une heure (ou plus) ce matin. Prier. Écrire. Puis j’ai faim. Toute la journée ! Je sais plus quoi manger.

Merci la Vie pour le soleil. pour mon appart. Pour ce soir, tellement dur, j’ai du mal à trouver pour quoi rendre grâce.. Merci pour ma voisine qui m’a envoyé un courriel.

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Sur la solitude, la vulnérabilité et la souffrance qui peuvent parfois mener à vouloir mourir, il me faut partager ces paroles si lumineuses de Jean Vanier:

Sur la question de la perte d’autonomie et du droit au suicide assisté
(pour ne pas être en état de dépendance envers les autres)

(…) nous sommes tous dépendants les uns des autres, et l’important est que chaque personne puisse découvrir la beauté de la vie parce qu’elle n’est pas seule, qu’elle est aidée et aimée.

Tous, nous naissons dans la faiblesse et nous mourons dans la faiblesse. Nous avons tous besoin par moments de recourir à l’aide de nos prochains.

Jean Vanier ne manque pas de remettre en cause les valeurs individualistes de notre mode de vie, il pense que la société se trompe en croyant que chacun doit être autonome et indépendant.

Les grands débats de société à propos des droits de la personne peuvent en effet nous faire oublier que tous les êtres vivants sont profondément interdépendants, et que nous avons tous besoin les uns des autres.

Il nous rappelle avec justesse que nous avons besoin de passer du “je” au “nous” et que nous devons accepter nos fragilités. Et que c’est de cette acceptation de la vulnérabilité que peut surgir la véritable la force qui mobilise les collectivités.

La vraie question pour Jean Vanier ne réside non pas dans une législation pour aider à mourir, mais plutôt dans une quête pour aider à vivre. Il s’agit de savoir comment encourager la société à aider les faibles et les fragiles. Selon lui, Il est important de vivre pleinement notre force et notre faiblesse en même temps.

http://www.larche.ca:8080/fr_CA/nouvelles/jean-vanier-repond-a-la-cbc-sur-la-question-de-l-aide-medicale-a-mourir?j=portlet

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Extraits d’un article du journal Le Devoir : CHSLD – L’isolement ne prend pas de vacances

http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/384316/l-isolement-ne-prend-pas-de-vacances#

(…)plusieurs études démontrent que le seul fait « d’entretenir des liens sociaux, de prendre le temps de rendre visite à une personne, est très bénéfique tant sur le plan moral que sur le plan physique. Vous savez, on a beau dispenser des soins de qualité dans les centres d’hébergement, il n’y a rien qui puisse remplacer la présence d’un proche.

(…)

Mais des solutions existent pour compenser le manque de visites et le poids de la solitude, lance-t-il. « J’ai vu des expériences extraordinaires dans certains établissements où des garderies ont été installées. Ne pensez-vous pas que ça vient compenser pour l’absence de présence de la famille ? Voilà un exemple qu’il faut reproduire. Je pense aussi à des établissements où les aînés font du bénévolat pour l’Armée du Salut, qui leur apporte des vêtements lavés qui doivent être pliés en vue de leur mise en vente. Dans ce cas, les aînés se sentent utiles pour la société ! »

« On est tombés par terre quand on a reçu des propositions de gens qui, touchés par ce problème, nous ont demandé comment faire pour adopter un aîné ! Ce sont des personnes immigrantes qui nous l’ont demandé. Ç’aurait été une façon pour elles de s’intégrer au sein de la société québécoise et de faire du bénévolat. Mais les CHSLD nous ont dit qu’il n’existait pas de structure pour répondre à cette demande. Mais il faudrait bien y penser un jour… ».

* ***

Poème de Michel Pepin

Semence du chaos

Il y a le béton
L’acier
Le passé
Le bruit
Les tourments
La cassure du présent
Mes yeux ne voient presque rien
D’autre que la lourdeur du quotidien
Sale solitude aidant
Chaque jour est si pesant
Requiérant la force
D’un aveugle
Voyant tout de même
Un mince filet
De lumière
Au travers la poussière

extrait du livre Amalgame, de Michel Pepin

****

SOLITUDE ET HANDICAP : Quelques statistiques :

Plus de 20 % des personnes handicapées souffrent de solitude

La télévision reste le meilleur compagnon de nombreuses personnes handicapées. 22 % d’entre elles se trouvent en effet en situation d’isolement relationnel. Presque deux fois plus que l’ensemble de la population (12 %).

Dans son étude sur les solitudes en France, rendue publique le 7 juillet, la Fondation de France souligne que « la perte d’autonomie, la maladie jouent de manière très négative sur le maintien ou le développement de la vie sociale ». Sous tous ses aspects.

38 % ne disposent pas d’un réseau amical actif contre 25 % de l’ensemble de la population ; 46 % n’ont pas ou peu de contacts dans leur entourage familial (contre 39 %) ; etc. 16 % déclarent même n’avoir aucun ami (contre 7 %).

La pauvreté accroît le risque d’isolement

Plus d’une personne sur deux considèrent que la survenue de leur handicap s’est traduit par une érosion de leurs relations amicales. Que leurs amis se soient éloignés ou qu’elles aient moins d’énergie pour les rencontrer.

La pauvreté constitue un facteur aggravant. Les personnes en situation de handicap sont près de deux fois plus isolées lorsqu’elles sont en situation de pauvreté que lorsqu’elles disposent de revenus supérieurs à 1 500 €.

Les conjoints de personnes handicapées plus isolés aussi

Enfin, « vivre avec un conjoint confronté à la maladie ou au handicap n’est pas sans incidence sur la vie sociale », note la Fondation de France. Pour 4 aidants sur 10, la vie amicale est plus réduite qu’avant. 13 % sont isolés contre 11 % des personnes dont le conjoint n’est pas confronté à la maladie ou au handicap. Reste la télé…

https://ebipo38.wordpress.com/2014/07/08/plus-de-20-des-personnes-handicapees-souffrent-de-solitude/

 

http://www.pearltrees.com/barrezladifference/solitude-isolement-handicap/id7143717#item67743088

Chien d’assistance MIRA: journée d’évaluation, il y a un an 1/2 (Première partie)

2014-09-24 15.14.08Prologue

Déjà un peu plus d’un mois que je suis de retour avec mon chien d’assistance Mira! Et en attendant que j’arrive à parler de ma nouvelle vie à deux, je me suis rendue compte que je n’ai pas encore publié l’article que j’avais écris après être allée à la fondation Mira pour mon évaluation à  l’automne 2014, il y a un an et demi ! En voici la première partie

***

Wow, merci la Vie! Merci de m‘avoir permis de voir la possibilité d’avoir un chien d’assistance MIRA approcher ! Après plusieurs mois (un an et demi) d’attente, j’avais aujourd’hui  mon évaluation à la Fondation MIRA, à Ste-Madeleine.  Le but de l’évaluation: voir quels sont mes besoins pour guider les entraîneurs pour l’entraînement  dont le chien aura besoin. Aussi, pour voir quel type et personnalité de chien rechercher. Et j’étais heureuse “d’essayer” deux chiens!

J’ai toujours adoré les gros chiens, et là, wow, j’ai espoir d’avoir un compagnon pour m’appuyer dans le quotidien!!!

Merci la Vie pour ceux et celles qui m’ont aidée et ont rendu possible le voyage : mon ami qui a accepté de me conduire** C’était chouette de faire la route avec lui, ce grand coeur que l’aventure et l’adversité ne fait pas reculer… Merci pour mes deux sœurs de coeur, qui nous ont accueillis à Montréal pour la nuit. C’était bon de les revoir!! Courte nuit, lever presqu’en même temps que le soleil (bon, ok, le soleil se levant pour moi près des 7h.. J: merci pour la magie de ce matin, la brume si dense, mon énergie et le soleil qui perçait, caché sous la belle brume !

Merci la Vie, merci de tout coeur pour la journée à la fondation MIRA !

C’était chouette de pouvoir faire un essai avec deux chiens très différents.Difficile, avec le premier chien : jeune, excité, qui ne m’écoutait pas du tout.. mais c’est drôle, il s’est calmé, et m’écoutait quand on a réessayé avec le fauteuil manuel (pour voir si c’est un chien de traction dont j’ai besoin – surtout formé pour tirer un fauteuil manuel : option vite exclue, car ça demande la force de propulser, arrêter et maîtriser son fauteuil manuel…ce que je n’ai pas.  C’est fou comme je fondais! Ses yeux… je l’aimais et me sentais attirée, liée à lui !  Il était si attachant !

Plus pépère , le deuxième chien que j’ai essayé était beaucoup plus lent. Dès qu’il n’était pas en fonction, il était toujours couché.. À première vue, je me suis dit: ça y est, c’est le match parfait: il est vraiment plus à mon rythme… et il répondait tout de suite aux commandes: un vrai charme…  Mais je l’appelais patate. Un peu comme s’il n’avait pas aussi soif d’aider… Il était beaucoup plus près de sa retraite et je me sentais moins attachée à lui.

En tous cas, si je n’étais pas certaine que j’y arriverais, avec un chien d’assistance, (vu mon niveau d’énergie, entre autres), j’étais remplie de présence et le coeur léger et joyeux, le soir revenue! Je me suis sentie plutôt très à l’aise, en fait tellement bien avec les 2 chiens !  Évidemment, moins au moment où le jeune chien n’écoutait pas, et avec ma difficulté à être ferme, à lui dire non et à le ramener… Certains chiens ont plus besoin de fermeté. Ce sera pas facile toujours, mais je pense, en fait je sais que je peux y arriver, et ça rendrait mon coeur, tout mon être plus vivant !

Je sais aussi que ça me ferait grandir, ça m’entraînera à féliciter, à être patiente, à être à l’écoute de ses besoins de clarté et de fermeté parfois… et aussi de tendresse et de complicité ! Et laisser aller ma peur de le blesser…

Ça m’a rassurée de parler avec le psychologue sur place, qui faisait une partie de l’évaluation. Selon lui, nos impatiences, nos down, même les états intérieurs plus intenses, le chien comprend, et peut parfois aider à en sortir, en venant juste près de nous. Et s’il n’est pas à l’aise, il aura la queue entre ses jambes, ou autre signe facile à décoder… Fiou!

Vraiment, cette journée d’évaluation a ravivé mon espoir !

** J’aimerais vraiment préciser qu’après avoir exploré plusieurs possibilités pour me rendre avec mon fauteuil motorisé à la fondation MIRA à Ste-Madeleine (train et autobus possible seulement entre les grandes villes, me faudrait donc en plus réserver, coordonner et prendre trois fois différents véhicules entre Montréal et Ste-Madeleine: le service de transport adapté d’aucune région ne dessert un territoire si large en dehors du grand Montréal…Vu mon découragement et mon épuisement face à la complexité de la situation, j’ai eu la brillante idée de louer un camion de déménagement, qui n’avait pas de lift ou de rampe pour embarquer le fauteuil… on l’a échappé belle !!! Le madrier utilisé comme rampe a glissé, et hop, le devant du fauteuil s’est vite retrouvé dans le vide… rescapé d’une chute certaine par Clément, mon ami conducteur, cascadeur, créateur au grand coeur, qui a courageusement “plongé” pour le retenir, seul… jusqu’à ce que des voisins viennent vite au secours ! On a eu chaud! Mon fauteuil se classe plutôt dans la catégorie poids lourds… par lourd, j’entends 350 livres, tout nu, sans personne à son  siège…

 

« J’ai fait Montréal-Québec en fauteuil roulant. Tout ça me donnait de la drive ».

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Inspiration

J’ai demandé à Michel Pepin ce qui l’a inspiré, et ce qui l’a aidé à se dépasser, au fil des défis rencontrés. Sans hésiter, il m’a tout de suite parlé d’une employée d’un service gouvernemental qui l’a beaucoup appuyé et encouragé, à la suite de problèmes familiaux. Voyant ce qu’il vivait, cette dame a offert à Michel un soutien incroyable. Je sentais toute sa gratitude quand il m’a raconté qu’il lui parlait régulièrement, et comment au cœur des difficultés et des souffrances vécues, « c’est la seule personne qui est restée près de moi tout le temps, qui me donnait toujours de l’amour. Et à partir de là, j’ai cru que je valais quelque chose ».

« J’avais un sentiment d’autodestruction depuis que j’étais jeune. Je pensais pas mériter le bonheur. Pis quand le bonheur a été a côté de moi, je faisais tout pour qu’il s’en aille. Pis les gens qui étaient autour de moi, s’ils étaient fins, je les testais pour voir s’ils m’aimaient vraiment. Pis généralement, tout le monde s’en allait. Parce que je faisais des trucs méchants. Pis cette femme-là est restée avec moi, pis elle m’a toujours donné de l’amour. Pis là je me suis dit wow! c’est beau ça! C’est ça que je veux être! ».
Elle lui a offert Le petit prince, de St-Exupéry. Qu’il a tout de suite lu et qui l’a beaucoup inspiré. « Cette femme-là, c’est elle qui a pas mal transformé ma vie  ».

Regard sur la vie

J’ai ensuite demandé à Michel Pepin comment la maladie et le handicap ont changé son regard sur la vie. Il a repris une phrase célèbre du Petit Prince : « L’essentiel est invisible pour les yeux ». Et m’a dit qu’il se concentre sur les petites choses, les vraies choses.  « Avec le handicap, je me suis rendu compte qu’on se cassait la tête. Moi, tout le monde, ou presque. Et pour des  niaiseries. Pis que les vraies choses, c’est être bien à l’intérieur de toi. Être calme, avoir rien dans ta tête… C’est juste être bien, être zen, accepter ce qui t’arrive, pis avoir l’humilité de voir que tu as vraiment pas de contrôle sur ce qui t’arrives dans la vie. Tout ce que tu décides, c’est comment tu regarde les choses. Tu possèdes, je possède le droit du regard. Pis peu importe ce qui nous arrive, comment on va le prendre, c’est nous autres qui décide ! »

Michel dit que la maladie lui a appris à ne pas se centrer sur les illusions. Aussi, il dit que son corps est une illusion : « Tsé, il existe mon corps, mais c’est pas ce que je suis. Ce que je suis est à l’intérieur de moi. Ça fait zen, mais c’est vraiment ça (que) je pense ».

Il prend pour exemple plusieurs grands de ce monde, dont Mandela et Gandhi : « Ces gens-là ont trouvé l’énergie, la source à l’intérieur d’eux.
Pis moi, à l’intérieur de moi, j’suis pas malade ! Ce que je suis n’est pas malade. Mon corps a des handicaps, est malade, mais c’est une illusion de ce que je suis ».

«  Mon corps c’est une école »

Puis j’ai demandé à Michel de me parler de sa relation avec son corps, avant et après le diagnostic. Il m’a raconté qu’avant, il prenait un peu son corps pour acquis, et n’y faisait pas attention. « Je prenais de la drogue, je mangeais mal, je faisais de l’exercice, mais mon corps c’était juste un outil. Pour faire. (…) Maintenant, je sais pas, c’est un prolongement de ce que je suis ». Il aime son corps et le trouve beau. Et unique.

« Mon corps m’empêche de faire des trucs… C’est sûr qu’il me fait avoir des douleurs, qu’il me met des contraintes, mais ce que j’suis n’a rien à voir avec mon corps. Pis mon corps, y est là, pis je vis avec. Je suis pas fâché après, pis j’suis pas content… C’est juste qu’y est là, pis je dois « dealer » avec comment il est. ..au moment où il est.

En même temps, je le vois comme un maître, mon corps, pour m’apprendre des choses.
Mon corps c’est une école, pis à travers lui, j’apprends à devenir une plus grande personne.

Tu dois me trouver « New Age » pas mal, hein? »

Éclopée, mésadaptée, handica-quoi ?

Quel périple que d’admettre que j’ai maintenant cette difficulté à marcher, qui m’a d’abord obligée à me servir de béquilles pour me déplacer, puis ensuite d’une marchette. Ce n’est qu’après plusieurs mois d’encouragements sérieux et d’invitations et d’explications de la part de professionnels de la santé que j’ai finalement accepté d’utiliser une marchette. Ça me repoussait au plus haut point !!! Ça nous classe instantanément dans une catégorie à part : les invalides. Les béquilles sont moins menaçantes: elles sont temporaires. Avec des béquilles, les gens sont d’une gentillesse : soit ils se sentent tout de suite interpellés et font tout pour aider, pour ouvrir les portes, laisser leur place dans la file au supermarché, ou bien ils te racontent comment ça leur est arrivé à eux ou à leur fille ou leur grand-père. Ou ils réagissent simplement normalement. Comme si c’est dommage, mais normal : un accident peut arriver à tout le monde.

Mais quand on nous voit avec une marchette, là on atteint un autre niveau… que les gens ne peuvent simplement pas envisager pour eux-mêmes. Enfin, c’est à mon sens  ce qui explique le mur, ou à tout le moins ce malaise à nous regarder dans les yeux. Difficile. D’abord pour moi, d’accepter cet instrument, d’une laideur, qui me donne une démarche saccadée, incertaine, lente… et remarquée!!! Moi qui aimais pouvoir marcher d’un  pas assuré, où et quand je souhaitais ! Et surtout d’un pas normal !

Il est vrai que ça me manque de prendre des marches, surtout en nature l’automne, ou dans la neige l’hiver. Et de sentir les muscles travailler, et tout. Mais je crois que là où le bat blesse particulièrement, c’est l’image. Dur d’être maintenant regardée comme si j’étais différente, handicapée. La réaction qu’un bon ami du cégep a eue en me revoyant par hasard après plusieurs années, avec ma marchette, m’a fait tout drôle : il me regardait dans les yeux et n’osait pas du tout regarder la marchette. Il parlait sans arrêt de ce qu’il était devenu. Je sentais chez lui un grand malaise. Et je trouvais difficile de ne pas pouvoir lui partager aussi comment ma vie a évolué depuis le cégep. Les défis de la SP et autres, mais aussi les choses que j’ai accomplies, contre toute attente ! Mais au fond, est-ce vraiment si important, le paraître? C’est fou, comment on accorde tellement plus d’importance au « faire » qu’au simple « être ».

Et puis me voilà maintenant bel et bien confrontée à une nouvelle étape, celle du ouf, du fauteuil roulant. Si difficile à accepter ! Je ne l’utilise pas à la maison : parce que j’en ressens pas le besoin, parce que je veux maintenir ma capacité à marcher, mais aussi parce que ce n’est pas adapté chez moi. Comme mon fauteuil roulant motorisé est dans le garage de mon bon ami et que je n’y ai pas accès directement, je l’utilise seulement à l’occasion. Je dois m’habituer à le manœuvrer.

Il me faut aussi apprendre de nouvelles façons d’entrer en contact avec les gens. Je sens que le fauteuil met un mur. On dirait que je me sens totalement différente, dans un autre monde où l’on ne me regarde plus de la même manière, qu’on ne me voit plus (je sais, je me rappelle d’un temps, où avant mon diagnostic, je ne voyais juste pas les gens en fauteuil roulant. Comme s’ils n’étaient plus partie de cette course folle,  et ne me paraissaient donc plus visible… en fait, je ne sais trop…).

 eclopee-1Vulnérabilité. Wow, quel chemin ! On nait vulnérable, et on nous accueille, nous embrasse, nous chouchoute. Puis vite, on perd cette innocence qui nous rendait libre… et heureux! Et capable de rire, chanter, danser, aimer sans ce souci de la perfection, sans cette peur tenace d’être jugé et rejeté ! Je sais que mon propre sentiment de ne pas être à la hauteur ou d’être indigne d’être aimée me coupe l’herbe sous le pied, et me paralyse tellement !

J’ai demandé, et je demande encore à la Vie de m’aider à accueillir cette vulnérabilité, et puis pouf! Elle me fait un ptit clin d’œil, l’air de dire : « be careful what you are wishing for ;o) ».

Ne serais-je pas comblée de tout ce dont j’ai besoin pour retrouver cette vulnérabilité? Si la marchette a « frappé fort », je ne m’imaginais pas à quel point l’adaptation à un fauteuil roulant, même à temps partiel, serait tout un défi !

Ni l’attente d’un logement adapté! Un autre des nombreux thèmes sur lequel il y a tant à dire, j’y reviendrai.

Peut-être que la perception des gens sera différente quand j’arriverai à poser sur moi ce regard aimant sur l’être vulnérable, « infirme », invalide que je suis. Mais aussi sur cette jeune femme coquette, têtue, passionnée à mes heures, battante, en quête de communauté, d’entraide et d’éternité.

 

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