Nous voici en décembre, à quelques pas de Noël. La grande famille est réunie chez Arianne, une des petites filles de Simone. Tout le monde y est, même les absents. Les deux violons de Simone, pleinement restaurés, sont étalés sur la table du salon. Le petit violon d’enfance mériterait un nouvel étui, peut-être, mais l’autre a reçu un traitement royal. C’est mon fils Louis qui leur a redonné vie, avec l’aide d’un couple de la région, un artisan et une violoniste.
Pour un bref instant, entre deux bouchées d’aspic, je me vois entrer dans la maison de mes parents sur la rue Victoria, à Rockland. La porte donnait directement sur la cuisine et ma mère y préparait le repas. J’avais un disque de Ti-Jean Carignan sous le bras. Quand je le lui ai montré, son visage s’est allumé, tout excitée qu’elle était de me voir enfin utiliser son violon. Pourquoi tu l’as pas dit que c’est ça la musique que tu voulais jouer?
Hélas, c’est le piano que je voulais apprendre, comme mes frères et sœurs avant moi. Mais les sous étaient rares rendu à mon tour et j’ai dû me contenter d’apprendre le baryton dans la fanfare junior de Rockland. Ce n’est pas le plus sexy des instruments et jouer des gammes dans un petit appartement sur la rue principale était plutôt embarrassant pour un garçon de 12 ans.
Quelque part, je me dis que ce fut une grande déception pour elle de ne pas avoir pu partager sa passion de jouer et de maîtriser un instrument. Mais elle serait sûrement ravie de voir ses violons aujourd’hui, dans les bonnes mains de Louis. Une nouvelle vie commence.
Chut, je crois qu’elle me chuchote à l’oreille : Dis-lui qu’il faut le sortir à toutes les semaines, le violon a besoin d’air.
L’image du baryton est de Yamaha








