La pomme de tire-veille

Imaginez… Vous êtes naufragé sur une mer lointaine, flottant à la dérive, un vieux siège de bécosse comme bouée de sauvetage, le désespoir dans l’âme…

Tout à coup, dans l’épais brouillard qui vous enveloppe, un flanc de navire apparaît et une voix se fait entendre : « Accroche-toi à la pomme du tire-veille et tire, mon vieux, tire ! »

Vous prenez le temps d’apprécier le mot tire-veille, une déformation de tire vieil ou tire vieux. Sachez qu’il s’agit d’une vieille blague de marin et que la corde servait à grimper dans un bateau, ou à border la rampe d’embarquement. Vous comprenez aussi que la pomme est ce nœud au bout du tire-veille.

Vous pouvez cesser d’imaginer maintenant, vous êtes sauf.

La pomme de tire-veille est un nœud d’arrêt, comme tant d’autres, qui augmente le diamètre de la corde pour l’empêcher de glisser dans un trou ou dans la main, ou de s’effilocher.

J’aime les mots, pas juste ceux de la grande littérature, mais ceux du quotidien des gens de partout et de tous les métiers. Mon père, qui n’a pas eu d’éducation grand É, disait qu’il fallait savoir le nom des choses qui nous entourent (pas de machin-truc, de cossin, de c’t’affaire-là, de t’sais veux dire). Comme la planète fait partie de notre entourage, ça fait beaucoup de mots à connaître.

En voici deux autres pour vous gâter : la pomme de tire-veille est un cul-de-porc surmonté d’une tête-de-more puis doublé. Sans blague. Les noeuds ont de si jolis noms.