
Je fouille dans mon sac de courrier et tombe sur cette lettre que danièle mousso m’a envoyée alors que je commençais ma deuxième année à Toronto. Je ne l’ai jamais revu et je n’ai pas réussi à retrouver sa trace sur Internet, mais je me demande parfois ce qui lui est arrivé.

le 19 sept. ‘79
Et alors.
Sous quel arbre vous abritez-vous, sous quel ciel promenez-vous votre âme, sous quel nid cachez-vous votre © ?
Qui suis-je du haut de mes trente ans tout bien frais et bien sonné pour vous importuner de ma présence ! Avant je trouvais toujours le temps long, plein d’ennui, d’angoisses, de cigarettes, de bière, d’idées noires horriblement noires, et maintenant ça coule trop vite, je vis dans la lumière du jour, j’enfourche une bicyclette vers 5 ou 6 h. du p’tit matin, vais méditer dans le « bo » parc Lafontaine et puis les journées filent trop vite. L’été en moi a été fécond en amour, en amitiés, en relations inhabituelle (?) ou quelque chose comme ça, mais pövre en sous et évidemment à tous les automnes je me retrouve toujours sans le sous, aucun, sans logis, en transit ici ou là, comme à tous les automne j’ai revêtu ma peau de clocharde emportant sous mon bras ma poupée de chiffon et « oscar ». Et alors?
Il y a des mouvements répétitifs dans une vie au-delà de mon entendement. C’est comme ça, je suis la courbe avec moins d’angoisses, plus de légèreté mais avec autant d’insécurité. Et puis je vais emménager dans mon nouveau logis au début de novembre. Ça va être mon tout premier à moi seule depuis trente ans !! Touchons du bois ! J’ai le rythme lent, il y a une tortue qui meurt en moi, c’est peut-être que maintenant que je suis mûre. Depuis 2 semaines j’habite chez Gilles, un ami, autour du carré Saint-Louis, la saison est encore belle et je profite du quartier des promenades à pied ou à bicyclettes des rencontres d’été au hasard des rues et des cafés avant que l’hiver nous « hibernise ».
J’ai passé une semaine dans un ashram dans l’état de New York, il y a là un grand Yogi et plein de bô monde. C’est sûrement une des plus belles et plus profondes expérience de toute ma vie. Que dire ?
Je m’engage lentement dans les activités communautaires du quartier, fêtes bénéfices, cours de menuiserie, bazaars au profit des chômeurs & assistés sociaux. Voilà toute ma p’tite réalité de l’instant dans ces quelques pages.
Je pense que j’ai toujours eu un peu peur de tes grands jugements philosophiques, Gilbert ou plutôt j’ai peut-être toujours un peu peur que tu me juges sévèrement, c’est comme si j’ai jamais osé te défier. Mais ça c’est aussi mon éternelle insécurité…
J’espère que la vie se porte bien avec toi, j’ai souvent pensé à toi ces derniers temps quelque chose comme une intuition très forte, des images de toi dans mes rêves…..
Om Naneah Shivaya
Bô rêves, belles bises
danièle