
Je me sens très attachée aux animaux. Ils sont là et nous ne les voyons pas.
Oui, nous les voyons, s’ils sont beaux, ou dans une zoo. Mais voyons-nous leur détresse? Voyons-nous ceux qui souffrent car on détruit leur habitat? Que faisons-nous si nous écoutons que des chiens errants ont mordu un enfant? Oui, je comprends que c’est terrible, surtout si nous connaissons soit l’enfant ou sa famille. Mais est-ce que quelqu’un se demande pourquoi le chien a attaqué l’enfant? Est-ce que c’est que l’enfant a attaqué avant? Car, cela arrive… oui, il y a des enfants que trouvent drôle de lancer des pierres aux animaux, ou simplement de les tuer. Ou est-ce que peut-être le chien mourait de faim, car on s’est débarrassé de lui quand il n’était plus un chiot mignon, ou que la famille devait partir en vacances ou simplement on ne pouvait plus le garder? Ces chiens là, se bataillent à mort pour un morceaux de nourriture, car la nature proche de la ville n’en fournit plus, comme une forêt le ferait. Comment vont-ils se nourrir?
Malheureusement, on pense toujours à ce qui nous affecte à nous mais nous ne pensons pas pourquoi des gestes sont posés.
Vous direz, cela ne arrive pas chez nous, pas au Canada. Peut-être, même si j’en doute, car si ce n’est pas dans nos quartiers c’est ailleurs. Mais, même ailleurs c’est chez nous!
Je peins surtout les chiens errants. Je viens du Chili, et j’ai grandi entourée des chiens errants.
Je n’oublierais jamais un soir dans une foire à Santiago du Chili, j’étais avec une de mes belle-sœurs. Il y avait beaucoup de monde dans ce parque et j’ai vu une chienne en détresse. Elle était dans les os et bougeait la tête comme sans savoir quoi faire. La seule chose que j’ai pensé a été de lui acheter deux hot-dogs et de lui offrir. Une voisine m’a dit incrédule que comment je pouvais acheter des hot-dogs pour l’offrir à un chien. Et je lui ai répondu, regardez bien cette chienne! Elle est en train de mourir! Et là elle a ouvert les yeux… elle a vu!
C’est cela notre problème aujourd’hui, nous ne voyons que cela que nous intéresse et nous ne voyons pas la détresse qui est devant nous.
Nous pouvons dire la même chose des sans abris qui quêtent dans les coins de rues et nous les ignorons car nous ne voulons pas aider à nourrir une dépendance. Nous ne voyons pas la détresse qui a mené à cette dépendance et la souffrance qui empêche de s’en sortir.
J’ai beaucoup souffert dans ma vie. J’ai été abandonnée. J’avais un toit, des parents et des frères, mais j’ai été abandonnée. Quand je dessine un animal abandonné, surtout les chiens, d’une certaine manière je me dessine. Le fait de les dessiner, d’en faire une œuvre d’art, est ma manière de lui donner une place, de leur montrer et de leur dire, oui, vous existez, vous êtes là, je vous vois et je vous aime.
