Un petit mal pour un grand bien

Certains livres nous divertissent, sur le moment, mais sont très vite oubliés. Je n’ai aucune idée du nombre de polars ou d’autres livres “à sensation” que j’ai pu lire au cours des cinquante dernières années, mais je sais qu’il y en a eu des chars et des barges et qu’ils ont tous eu comme fonction de m’occuper la tête, quand ce n’était pas de “changer le mal de place”.

D’autres livres, d’un abord plus difficile, laissent une empreinte durable. J’ai lu en ce début d’année Des vies à découvert (Unsheltered) et On m’appelle Demon Copperhead (Demon Copperhead, prix Pulitzer 2023, ô combien mérité!), deux romans de l’auteure américaine Barbara Kingsolver. Dans les deux cas, j’ai d’abord eu l’impression de m’escrimer sur une tâche fastidieuse, mais, petit à petit, l’ennui a cédé la place à un sentiment intense de découverte. La persévérance, en lecture, nous permet quelquefois d’entrer, comme par le chas d’une aiguille, dans des mondes, des histoires et des réflexions profondes qui nous transforment.

Il y a un peu moins de trente ans, une jeune femme anglophone à qui j’enseignais le français a proposé que nous nous prêtions mutuellement des livres, question de faire quelques pas dans la culture de l’autre. Avec le livre The Poisonwood Bible, qui venait tout juste de paraître, elle m’a fait découvrir Barbara Kingsolver, biologiste de formation et écologiste de la première heure.

Des vies à découvert, qui est à la fois contemporain et historique, nous permet de faire une incursion dans la vie et le travail – d’une importance majeure – du personnage tout à fait réel de Mary Treat, une entomologiste et botaniste américaine du XIXe siècle. Il nous amène aussi à connaître (et peut-être même à aimer très fort) une famille qui était jusque là passablement épargnée par la vie, mais qui se retrouve brusquement face à une adversité presque foudroyante. De très belles pages sur la parfaite imperfection de l’humanité.

Dans On m’appelle Demon Copperhead, la référence à Charles Dickens et à son David Copperfield est évidente. Et tout à fait voulue. Le livre en entier est un hommage à la résilience. Une seule dédicace ouvre le récit: “À tous les survivants”. Une fois qu’on s’est familiarisé avec le style très particulier de l’écriture, qui peut être déroutant à prime abord, on peut suivre avec compassion le formidable périple de Demon, qui a une, deux… ou mille choses à nous apprendre sur la résilience.

Merci à ChesterMirt pour l’image, libre de droits, de la bibliothèque.

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