
Le concept d’attachement renvoie au lien émotionnel fort et durable qui s’établit entre l’enfant et certaines personnes de son entourage social (Shaffer, 1996 ; Sroufe, 1995). L’une des figures de la théorie d’attachement, John Bowbly, a démontré, par l’entremise de ses études avec des orphelins, que les effets de l’absence de relations sociales stables avec des adultes pouvaient être enregistrés, même avec des soins physiques et médicaux de qualité reçus (Tarabulsy, Larose, Pederson et Moran (2000). En d’autres termes, même si les soins de base sont de bonne qualité, sans attachement, un enfant éprouvera de grandes difficultés. L’attachement est une relation qui fournit à l’enfant la sécurité nécessaire à son développement (Ainsworth, 1969 ; Bowlby, 1969 ; Sroufe, 1995 ; Pervin et John, 2005).
Cet article présente, dans les lignes qui suivent, le processus d’attachement ; la situation étrange ; les styles d’attachement ; les types d’attachement et la personnalité à l’âge adulte ; et les effets probables d’un attachement sécurisant.
Le processus d’attachement
Le processus d’attachement s’enclenche tôt après la naissance (quelques semaines après), mais il commence à se manifeste autour du sixième mois. L’enfant s’enthousiasme toujours pour le contact des personnes qu’il connait* bien, mais fait preuve de froideur, voire de méfiance envers les étrangers (Gosselin et Cloutier, 2005). Vers le huitième mois, cette réaction se transforme en un mélange de peur et de détresse (Schaffer et Emerson, 1964). Toutefois, cette peur des personnes étrangères est loin d’être systématique. Elle devient apparente lorsque l’adulte étranger initie le contact et s’approche rapidement de l’enfant. Elle pourra gagner en intensité si l’adulte établit un contact physique. Lorsque le contact se fait peu à peu et adapté selon les circonstances, l’enfant est moins susceptible de réagir négativement (Gosselin et Cloutier, 2005, p. 356).
L’attachement se manifeste aussi par la séparation d’avec les parents comme le démontre la situation étrange ou situation insolite, une méthode créée par Mary Ainsworth, une psychologue canadienne qui s’est intéressé au développement et à la sensibilité des mères.
La situation étrange
Cette méthode consiste à observer la réaction de l’enfantau cours de huit épisodes durant lesquels l’enfant et le parent sont séparés, puis réunis pendant de courtes périodes. Il s’agit d’une technique expérimentale d’évaluation de la qualité de l’interaction mère-enfant (Tarabulsy, Larose, Pederson et Moran, 2000 ; Guédeney et Guédeney, 2009 ; Tessier, 2011). Ainsworth a surtout le mérite d’avoir conçu les styles d’attachement.
Les styles d’attachement
Les styles d’attachement décrits par Ainsworth proviennent de l’étude en laboratoire des réactions de l’enfant face à la séparation de sa figure d’attachement, l’attachement étant une relation, un lien affectif qui fournit une base de sécurité. Les enfants sont classés en quatre catégories selon leur mode d’attachement (St-Yves, 2009).
1. Attachement sécurisé (ou de type B)
• 70 % des enfants.
• L’enfant est sensible au départ de la mère :
– Il manifeste une réaction de détresse transitoire.
– Au retour de sa mère, il l’accueille en souriant et il est facilement réconforté.
– Par la suite, il retourne à l’exploration et se remet à jouer.
2. Attachement évitant (ou de type A)
• 20 % des enfants.
• L’enfant proteste peu au départ de la mère (il manifeste peu d’émotions), mais il est fuyant à son retour.
– Il évite les regards et s’éloigne.
– Son attention se porte surtout sur des jouets.
– Sa préférence entre une tierce personne (un inconnu) et le parent est latente.
3. Attachement anxieux/ambivalent (ou de type C)
• 10 % des enfants.
• La séparation ainsi que les retrouvailles sont difficiles.
– L’enfant exprime beaucoup de détresse au moment de la séparation et il est difficilement apaisé au retour du parent.
– Paradoxalement, l’enfant supplie la mère de le prendre et se débat pour être déposé au sol.
– Il manifeste peu de comportements d’exploration.
4. Attachement désorganisé (ou de type D)
• Entre 5 et 15 % des enfants.
• Certains enfants réagissent de façon désorganisée lors de la situation étrange.
• Ces enfants hésitent entre une recherche de proximité excessive et un évitement intense.
– Ils peuvent passer d’une émotion à l’autre ou adopter une expression figée.
– Ces enfants réagissent par des comportements plutôt confus.
Les styles d’attachement mettent en évidence un principe central de la théorie de l’attachement : la qualité de la relation d’attachement est dépendante de la sensibilité du donneur de soins aux besoins de sa progéniture (Ainsworth, Blehar, Waters et Wall, 1978 ; Tessier, 2011).
Types d’attachement et personnalité à l’âge adulte
• Ces styles d’attachement sont stablespour une figure d’attachement donnée, mais ils peuvent évoluer en fonction des conditions de vie.
• Le style d’attachement sera stable si le contexte familial l’est aussi.
• Il existe un rapport entre les types d’attachement à l’enfance et ceux adoptés dans les relations amoureuses, à l’âge adulte.
• En vieillissant, il est permis de penser qu’on retrouve le niveau de sécurité de notre enfance (Pervin, 2004 ; St-Yves, 2009).
Les effets probables d’un attachement sécurisant
Ils sont les suivants :
• Meilleure sociabilité avec les pairs et les adultes
• Meilleure estime de soi
• Meilleure persévérance dans la résolution de problèmes ou dans l’exécution d’une tâche.
• Meilleure estime de soi
• Meilleure acceptation par les pairs
• Plus grande indépendance
• Plus d’empathie
• Moins de comportements agressifs
• Moins de problèmes de comportements (Gosselin et Cloutier, 2005, p. 361).
La construction des liens d’attachement est utilisée comme prototype de toutes les relations ultérieures et devient donc une composante centrale de la personnalité de l’adulte (Pervin et John, 2004). « Au-delà de la provision de nourriture, la relation privilégiée établie avec des personnes spécifiques assure l’enfant d’une qualité et d’une continuité de soins dont il retire la sécurité indispensable à son développement social et émotif » John Bowlby (1969). Comme les parents se trouvent, d’un point de vue naturel, au premier rang des figures d’attachement de l’enfant, parmi les personnes qui interagissent fréquemment avec lui et qui en prennent soin, ils ont besoin d’être soutenus dans leurs rôles. D’où l’existence du blog de Bytchello Prévil !
« Alors que les enfants dépendent totalement de leurs parents pour survivre, dans toutes les communautés, sauf les plus primitives, les parents, et surtout les mères, dépendent plus largement de la société pour les besoins économiques. Si une communauté attache de la valeur à ses enfants, elle doit chérir ses parents » (John Bowlby, 1951).
Bref, les premières relations d’attachement peuvent être perçues comme des provisions globales à vie. L’attachement est un lien essentiel qui favorise des relations positives et bienveillantes, en particulier dans le domaine de l’éducation, et s’établit en grande partie par le biais d’interactions quotidiennes. En un mot, il faut prendre soin des enfants avec révérence et diligence !
Bytchello Prévil, écrivain, éducateur, instructeur de FLS, superviseur agréé dans le secteur de la petite enfance et titulaire d’une prestigieuse bourse d’excellence scolaire en administration des services à l’enfance