Par Janine Messadié
Enfant, j’écoutais le bruissement des arbres
À la nuit tombante
Et ma grand-mère me racontait l’histoire
De bateaux ivres, perdus en mer
Dans le jardin, près du buisson de roses
J’ai cru voir sa silhouette lente
Mais l’aube est venue solitaire
Il faut mourir un jour
mon amour
L’éternité n’est qu’un songe
Un impossible rivage
Je ne connais que l’Infinitude de la mer
et du ciel
Le temps est une conquête impossible
Souviens-toi
J’ai fermé toutes les fenêtres de la maison
Éteint toutes les lampes du salon
Couvert tous les objets de mouchoirs noirs
Et me suis habillée de perles dans mon boudoir
J’ai déchiré toutes les lettres de mes romances
Mis le feu au piano avec indifférence
Couvert tous les rideaux de parfums de Byzance
Et me suis habillée d’ombre et de silence
J’ai vidé tous les vases et les cendriers
Versé sur le tapis l’encre des encriers
Couvert de chiffons tous les tableaux accrochés
Et dessiné sur mon corps des nuages bleutés
Je suis toute seule dans mon délire
Avec une étrange envie de rire
Je funambule dans mon délirium
Avec l’envie étrange de ne plus voir personne
Je voudrais dans ce matin blafard
Recréer l’enfance, inventer le rêve
Et m’envoler comme un oiseau céleste
Emportant, le mal, le deuil, la mort et l’ennui
La seule absence est celle du souvenir
Il n’est rien que nous aimons
Qui ne fuit comme l’ombre
Poèmes extrait du recueil Les portes de l’oubli
© Janine Messadié / Sartec 5696 (1996-3023)
Janine Messadié habite Ottawa. Elle est l’auteure de Lettre à Tahar Ben Jelloun paru aux Éditions L’Interligne en 2021